La gauche au pouvoir, un moindre mal ? Les travailleurs n'auront que ce qu'ils imposeront05/04/20122012Journal/medias/journalnumero/images/2012/04/une-2279.gif.445x577_q85_box-0%2C8%2C172%2C231_crop_detail.png

Leur société

La gauche au pouvoir, un moindre mal ? Les travailleurs n'auront que ce qu'ils imposeront

Bien des travailleurs qui s'apprêtent à voter pour Hollande, ou même pour un Mélenchon supposé pousser Hollande à gauche, n'en attendent pas de miracle. Peu d'électeurs de gauche ont assez d'illusions pour croire que Hollande, Mélenchon ou un autre soient capables d'empêcher les patrons de licencier, de fermer des usines, de délocaliser.

Peu croient qu'un gouvernement de gauche augmentera vraiment le smic à un niveau décent ou prendra des mesures contre le travail précaire. Peu espèrent qu'un gouvernement de gauche contraindra les riches à payer la dette que l'État a creusée pour les couvrir de cadeaux. Souvent, les travailleurs espèrent simplement que les coups s'arrêteront, que l'âge de la retraite ne continuera pas à reculer et les pensions à baisser, que les déremboursements de soins médicaux seront stoppés en l'état, que l'hémorragie d'emplois dans la fonction publique s'arrêtera, que l'État ne servira plus de caisse de secours pour les profits des grandes entreprises et de vache à lait pour les niches fiscales des milliardaires. Et c'est à peu près tout.

Malheureusement, ce sont les grands patrons qui décident et leur volonté s'applique au gouvernement, quel qu'il soit. Si Sarkozy, après Balladur et sans que l'intermède Jospin ait changé quoi que ce soit, a attaqué les retraites, ce n'est pas seulement parce qu'il est de droite, c'est surtout parce que le grand patronat l'a exigé. La diminution du nombre de fonctionnaires et la catastrophe qui s'ensuit dans les écoles et les hôpitaux, la hausse promise de la TVA, la restriction des budgets utiles à la population, ne découlent pas d'une position idéologique, mais d'abord d'une question comptable : si l'État veut offrir des milliards aux capitalistes, il doit les prendre sur la population.

Cette question se posera exactement de la même façon après l'élection, avec ou sans Sarkozy. La crise économique s'approfondissant, la bourgeoisie ne peut augmenter ses profits qu'en réduisant la part des travailleurs. Elle le fait dans ses propres entreprises, en réduisant les emplois, et elle exige de l'État qu'il le fasse au niveau de l'ensemble de la population, depuis les enfants à la crèche jusqu'aux vieillards à l'hospice, en passant par les malades, les écoliers et les handicapés. Et la machine d'État s'exécute sans rechigner, car elle est prévue pour cela.

Si les capitalistes le demandent, ou plus probablement quand les capitalistes le demanderont, le futur gouvernement français fera comme les gouvernements grec, espagnol ou portugais : il baissera les salaires et les pensions, inventera des lois qui transformeront l'ensemble des salariés en travailleurs précaires, licenciera des fonctionnaires, annulera les budgets sociaux.

De ce point de vue, Hollande ne sera pas « moins pire » que Sarkozy, et Mélenchon n'obligera pas Hollande à être « moins pire » que Hollande tout seul. Car ce qui sera déterminant, ce ne sera pas le discours, la couleur, ni la bonne volonté, si même elle existe, des ministres, ce sera le rapport des forces entre les classes sociales. Et c'est ce rapport de forces qu'il faudra imposer.

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