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Dans le monde
Venezuela : crise sociale et politique
La situation sociale devient dramatique au Venezuela, du fait de la pénurie de nourriture et des produits de première nécessité que le régime chaviste achète à 80 % sur le marché mondial.
Ce qui était facile quand le cours du baril de pétrole était très élevé est devenu quasi impossible avec l’effondrement des cours. À cela s’ajoutent des coupures d’électricité.
Faire ses courses pour acheter de la nourriture est devenu une activité harassante et parfois dangereuse. Les magasins sont aux trois quarts vides, y compris les magasins d’État. Il y a bien sûr un marché noir parallèle, mais quel que soit le circuit commercial auquel on peut s’adresser, les tensions sont nombreuses. Cela tourne parfois à l’émeute, voire au lynchage. Pour ne pas être dépouillés, des consommateurs font la queue sans argent sur eux, et c’est seulement au moment de payer qu’un tiers leur apporte la somme nécessaire.
Un Observatoire vénézuélien des conflits sociaux a enregistré entre janvier et mai de cette année près de 2 800 manifestations ou incidents découlant des pénuries alimentaires ou du mauvais fonctionnement des services publics. Le ministère de la Justice a entre les mains 74 affaires de lynchage. Face à cette situation très dégradée, le gouvernement de Nicolas Maduro adopte une attitude relevant de la méthode Coué. Il nie la situation de crise, interdisant dans les médias toute image montrant la pénurie ou les affrontements qui éclatent dans les commerces et la répression policière que cela peut déclencher.
Mais ce qui préoccupe le gouvernement chaviste au premier chef est le bras de fer engagé avec l’opposition de droite écartée du pouvoir depuis seize ans. En décembre dernier, les chavistes ont perdu la majorité au Parlement. Depuis, pour court-circuiter la droite, Maduro s’est octroyé des pleins pouvoirs. De son côté, la droite s’est lancée dans une procédure qui pourrait conduire à la destitution de Maduro, ce qu’elle avait déjà tenté, sans succès, contre Chavez. La récente destitution de la présidente du Brésil a galvanisé la droite. Les chavistes, comme l’ont fait les partisans de Dilma Roussef, dénoncent la menace d’un coup d’État tandis que la droite s’en donne à cœur joie, et pas seulement au Venezuela, pour brocarder le « socialisme du 21e siècle » que les chavistes prétendaient incarner.
Dans cette situation très difficile, certains choisissent de quitter le pays, partant pour un pays voisin, mais aussi vers l’Espagne et d’autres destinations. Mais, pour les familles populaires qui n’ont d’autre solution que de faire face à la situation et assurer le quotidien, c’est un choix presque impossible.
Le Venezuela subit de plein fouet la baisse des prix du pétrole, la principale ressource du pays. Il est facile pour la droite de s’en prendre au gouvernement chaviste. Elle le rend responsable des conséquences dramatiques de cette baisse pour la population, l’accuse d’avoir dilapidé les ressources lorsque les cours du pétrole étaient au plus haut, en les dépensant dans des programmes sociaux ou en les perdant dans la corruption. Mais si la droite parvenait à écarter les chavistes, son retour aux affaires prendrait rapidement un tour revanchard.
Les programmes sociaux des chavistes qui, sans qu’on puisse parler de « socialisme », avaient amené au moins un peu de progrès dans l’éducation, la santé, et contre la pauvreté, seraient à coup sûr remis en cause. Les classes populaires auront alors à se mobiliser, en ne se fiant pas à la droite bien sûr, mais pas non plus aux partisans de Chavez qui, on le voit maintenant, n’avait rien d’un « sauveur suprême ».