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Leur société
Revenu universel : un projet qui cache une escroquerie
Le référendum en Suisse sur le projet de revenu universel, rejeté par une majorité le dimanche 29 mai, a remis cette question sur le devant de la scène.
De quoi s’agit-il ? L’État verserait à chaque citoyen durant toute sa vie une allocation mensuelle fixe, indépendamment de la pauvreté – ou de la richesse – du bénéficiaire, qui serait donc cumulable avec d’autres ressources. Son montant serait censé couvrir les besoins élémentaires : manger, s’habiller et se loger.
En France, plusieurs politiciens se sont déclarés favorables à cette mesure. Cela va du PS avec Arnaud Montebourg et, plus tardivement, Manuel Valls, qui a déclaré que c’était une idée à débattre, à la droite avec le Républicain Frédéric Lefebvre qui en fait son cheval de bataille, en passant par les écologistes. Il y aurait donc un certain consensus pour déclarer vouloir faire du social « autrement », en accordant à chaque individu un « filet de sécurité » qui lui permette de voir la vie « sereinement ».
Si en Suisse les initiateurs du projet évaluaient ce revenu de base à 2 500 francs suisses (environ 2 300 euros), la somme évoquée en France est beaucoup plus modeste, puisqu’elle varie entre 400 et 750 euros, soit un montant qui ne dépasserait pas le RSA et resterait bien inférieur au seuil de pauvreté chiffré aux alentours de 1 000 euros. Dans ces conditions, parler de « filet de sécurité » est une escroquerie.
Verser 750 euros par mois à chacun coûterait 565 milliards d’euros à l’État, selon une étude faite par la Fondation Jean-Jaurès, un organisme proche du Parti socialiste. Une partie de cette somme serait récupérée au travers de l’impôt sur le revenu, pour ceux qui y sont assujettis, et la Fondation avance que le reste pourrait être facilement trouvé... en supprimant toutes les allocations et en augmentant la TVA de deux points !
À la place du « maquis » des aides sociales maintes fois dénoncé par le patronat et la droite, on aboutirait selon cette fondation à une simplification en regroupant « toutes les dépenses actuelles de protections sociales – retraites, assurance-maladie, chômage, allocations familiales, à l’exception de celles consacrées à la prise en charge des affections de longue durée » en une allocation unique. Les auteurs de l’étude pensent même que 400 euros mensuels seraient suffisants pour vivre, y compris en payant de sa poche une couverture maladie individuelle ! À terme aussi, on pourrait arriver à supprimer le smic.
Le consensus entre hommes de gauche et de droite autour d’un tel revenu de base universel n’est guère surprenant, puisque PS et Verts ont prouvé qu’ils n’avaient pas plus de scrupules que la droite à servir la soupe aux riches en appauvrissant l’ensemble des travailleurs, qu’ils aient un emploi, soient chômeurs ou retraités. L’octroi de ce revenu universel, présenté comme une mesure sociale « moderne » pour éradiquer la pauvreté, loin d’être une mesure humanitaire pourrait au contraire être une façon de s’attaquer aux aides qui permettent aux plus pauvres de surnager.
Sous des aspects de générosité, d’égalité et de simplification pourraient donc se cacher de nouvelles attaques aux droits des travailleurs, et finalement à leurs revenus. Car dans tout cela une chose est claire : aucun des défenseurs de ce projet n’envisage en quoi que ce soit de s’attaquer aux revenus du capital. Quand la suggestion est évoquée, c’est pour la rejeter aussitôt. La société actuelle produit pourtant suffisamment de richesses pour permettre à chacun de vivre décemment, en fonction de ses besoins, à condition de s’en prendre à une classe capitaliste au parasitisme de plus en plus monstrueux.