Incendies à Saint-Denis : habitat insalubre et marchands de sommeil22/06/20162016Journal/medias/journalnumero/images/2016/06/2499.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Incendies à Saint-Denis : habitat insalubre et marchands de sommeil

Le 6 juin, un incendie a ravagé un immeuble rue Paul-Éluard à Saint-Denis, faisant cinq morts dont trois enfants ainsi que onze blessés. C’est finalement la piste criminelle qui a été retenue puisqu’un squatteur a avoué avoir mis le feu à un matelas d’un appartement du premier étage.

Mais si l’incendie s’est propagé aussi rapidement, c’est bien parce que l’immeuble était vétuste, avec en particulier un escalier en bois qui n’a laissé aucune chance à la famille habitant au quatrième étage. Comme dans de nombreux autres immeubles de Saint-Denis, une partie des logements appartenaient à des individus peu scrupuleux, et parfois à de véritables marchands de sommeil.

Ainsi, un des appartements était « loué » à des squatteurs, les deux restaurants au rez-de-chaussée ainsi que leurs caves, loués par le même propriétaire, n’étaient pas aux normes, les caves étaient aussi habitées. Ce propriétaire de surcroît ne payait pas ses charges et bloquait tous les travaux. Les autres propriétaires de bonne foi, souvent occupants, avaient tenté des recours juridiques contre ce loueur crapuleux. Mais le système protège ces marchands de sommeil assez opulents pour payer des avocats habiles qui s’ingénient à faire durer les procédures.

Le père de la famille décédée, seul survivant, grièvement brûlé après s’être défenestré, a crié sa colère : « 750 euros par mois pour 26 m² sans allocation logement. Ça fait quinze ans que je me bats pour un F3. Maintenant, on nous a offert des cercueils, voilà la maison que l’on a donnée à mes enfants. » Cette famille avait déposé une demande de logement social et avait fait valoir son droit à un logement en s’appuyant sur la loi Dalo. En vain.

Dans la même semaine, trois autres incendies se sont déclarés à Saint-Denis, sans faire de morts bien heureusement, mais laissant 36 familles en attente de relogement. Les causes sont similaires : pauvreté, vétusté, cupidité des marchands de sommeil. La ville compte de nombreux immeubles insalubres et si la mairie a bien engagé, en obtenant des aides de l’État, une politique de résorption de cet habitat, la tâche est immense et les moyens déployés dérisoires.

Alors on comprend l’indignation des riverains de l’immeuble de la rue Paul- Éluard, en particulier des enseignants du collège Elsa- Triolet voisin, qui accueillait les enfants morts dans l’incendie. Dans un communiqué ils s’indignent de l’incurie et de l’indifférence des pouvoirs publics qui ferment les yeux sur la situation du mal-logement dans cette ville : « Nous tenons à pointer la responsabilité des politiques de ségrégation sociale menées dans les quartiers populaires, à Saint-Denis en particulier. Depuis longtemps déjà, les habitants de Saint-Denis dénoncent les discriminations qu’ils subissent quotidiennement (…). Les collectivités publiques engagent 1,7 milliard d’euros pour financer la coupe d’Europe de football. C’est autant d’argent qui ne servira pas à rénover les logements insalubres comme celui de la rue Paul-Eluard, ni à construire des logements sociaux. » On ne peut que leur donner raison !

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