États-Unis : Detroit mise en faillite par le capitalisme25/07/20132013Journal/medias/journalnumero/images/2013/07/une2347.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

États-Unis : Detroit mise en faillite par le capitalisme

Le 18 juillet, le gestionnaire financier de crise à la tête de Detroit depuis quatre mois a annoncé la mise en faillite de la ville. Une soixantaine de collectivités locales ont déjà fait faillite aux États-Unis, mais c'est une première pour une ville de cette importance. L'épisode est révélateur de l'impasse dramatique dans laquelle la crise capitaliste a entraîné la population, tout en permettant à une poignée de spéculateurs et de gros actionnaires d'amasser des fortunes.

Detroit a été une des plus grandes villes industrielles américaines, la capitale mondiale de l'automobile dans les années 1950, mais elle a perdu plus d'un million d'habitants et n'en compte plus aujourd'hui que 700 000. À partir des années 1970, General Motors, Chrysler et Ford ont fermé des usines et transféré leur production dans d'autres régions ou sur de nouveaux terrains à l'intérieur même de la ville, réalisant au passage de fructueuses opérations immobilières, cumulant les réductions d'impôts de la ville et réduisant des milliers de travailleurs au chômage. Aujourd'hui, plus de la moitié des adultes sont au chômage.

Avec la baisse de la population et les conséquences catastrophiques de la crise des subprimes en 2008, mais surtout en raison des multiples cadeaux sous forme de subsides ou de réductions d'impôts aux entreprises, à commencer par les constructeurs automobiles, les caisses de la ville se sont vidées et la municipalité est tombée sous la coupe des banques, devant souscrire de nouveaux emprunts pour rembourser les anciens. L'endettement a explosé, atteignant aujourd'hui au total 18 milliards de dollars.

Depuis trente ans, c'est une véritable guerre de classe qui est menée pour faire payer la crise aux travailleurs et à la population pauvre. Pour pouvoir rembourser les banques, la ville a sacrifié les services publics, dépouillé le fonds de retraite des employés municipaux et la couverture médicale des retraités. Elle a fermé des centres de loisirs, des bibliothèques, des casernes de pompiers, des centaines d'écoles, des lignes de bus. L'éclairage public n'est plus assuré. Les ordures ne sont ramassées qu'une fois par semaine, les circuits d'eau et les égouts sont dans un piteux état. Les peintures des musées et même les animaux du zoo sont à vendre au plus offrant.

En annonçant qu'il déclarait Detroit en faillite, Kevin Orr le gestionnaire financier de crise chargé de faire en sorte que la dette de 18 milliards sera bien remboursée aux banques et aux gros créanciers, a expliqué qu'il ne fallait pas s'inquiéter, les affaires allaient continuer comme par le passé. En fait la population, elle, a toutes les raisons de s'inquiéter.

Dans les années 1960, la révolte des quartiers populaires de Detroit, et notamment de la population noire, très largement majoritaire, pour la justice et l'égalité des droits, avait effrayé la bourgeoisie et obligé les grands groupes de l'automobile à en finir avec la ségrégation qui empêchait les Noirs d'accéder aux emplois industriels. C'est dans cette période que de l'argent avait été débloqué pour les programmes sociaux, pour créer des écoles et des services publics.

Aujourd'hui, seule cette intervention de la population pourra empêcher que la faillite de Detroit ne soit utilisée pour dépouiller les employés et retraités de la ville, et pour justifier de nouvelles attaques contre les services publics.

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