Égypte : Nouvelles violences contre les coptes - une « stratégie de la tension » ?11/05/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/05/une-2232.gif.445x577_q85_box-0%2C12%2C167%2C228_crop_detail.png

Dans le monde

Égypte : Nouvelles violences contre les coptes - une « stratégie de la tension » ?

La nuit du 7 au 8 mai a vu s'affronter des Égyptiens coptes et musulmans, une nouvelle fois, dans le quartier populaire d'Imbaba, au nord-ouest du Caire : au moins douze morts et deux cent soixante blessés sont à déplorer, dans les violences qui ont fait suite à l'incendie de deux églises chrétiennes du secteur.

Il a été question, au départ, d'une rumeur récurrente concernant une chrétienne qui se serait convertie à l'islam et serait depuis enfermée par sa famille. Mais les attaques violemment anti-coptes ne sont malheureusement pas nouvelles. La nuit du nouvel an, un attentat avait visé une église d'Alexandrie, provoquant la mort de 23 personnes. En mars, dans le quartier pauvre de Moqattam au sud-est de la capitale, où la majorité des habitants - chétiens - survivent en recyclant les ordures, six coptes ont été tués et plusieurs dizaines d'autres blessés lors d'une attaque perpétrée, selon un prêtre du quartier, par des voyous et des salafistes. En avril, dans un gouvernorat pauvre du sud du pays, à Qena, des manifestants se sont réunis pour protester contre la nomination d'un nouveau gouverneur, copte, accusé par ailleurs d'avoir collaboré avec les services de la Sécurité de l'État.

À chaque fois, des témoignages font état de la présence déterminante de boutefeux appartenant à des mouvements salafistes ou à une pègre manipulée, sans qu'il soit évident de démêler les uns des autres. La clique de Moubarak ou les services qui en dépendaient ne dédaignaient pas de recourir à de telles provocations : la minorité copte peut faire office de bouc émissaire dans la situation de misère profonde que connaissent de nombreux quartiers du Caire, de villes du Sud ou du Delta.

Aujourd'hui, trois mois après le départ de Moubarak, la situation sociale reste tendue, tandis que les changements réels se font attendre.

La hausse des prix de l'alimentation - 21 % en un an - et du carburant pèse lourdement sur la situation de la majorité de la population des villes et des campagnes. L'inflation officielle a atteint en avril le rythme de 12,4 % sur l'année. Des mouvements de grève en cours, comme à l'usine de meubles Mefco d'Helouan, à l'usine de céramique Jawhara de Sadate City ou à l'aéroport d'Abou Simbel, montrent que les travailleurs continuent à juste titre d'exiger des hausses de salaire.

Dans ces conditions, les affrontements interreligieux pourraient fournir un dérivatif bien commode au mécontentement. Et il est probable que des éléments de la police, de l'armée ou des services secrets agissent pour souffler sur le feu. À Imbaba, la police s'est d'ailleurs bien gardée d'intervenir pour empêcher les affrontements.

Ainsi, c'est peut-être une stratégie de la tension version égyptienne qui est en marche, preuve que le nouveau pouvoir, ou certains de ses éléments, n'hésite pas à recourir aux mêmes sales méthodes que son prédécesseur.

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