Médecine du travail : Le gouvernement accentue la liquidation02/02/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/02/une-2218.gif.445x577_q85_box-0%2C14%2C163%2C226_crop_detail.png

Leur société

Médecine du travail : Le gouvernement accentue la liquidation

Jeudi 27 janvier, le Sénat a adopté une loi sur une nouvelle organisation de la médecine du travail, en particulier pour les PME-PMI. Cette réforme ne traite pas du principal problème concernant la protection de la santé des salariés au travail : le manque criant et croissant de médecins du travail

Actuellement, seulement 6 800 médecins du travail suivent la santé de seize millions de salariés du secteur privé, soit un médecin pour 2 300 travailleurs. Il n'est donc pas étonnant que même les simples visites médicales obligatoires de contrôle, après être passées d'une périodicité de un à deux ans, ne soient parfois même pas honorées.

Et plus de la moitié de ces spécialistes en exercice, ayant plus de 55 ans, partiront en retraite dans les prochaines années. D'ores et déjà des centaines de postes ne sont plus pourvus et rien n'est fait par cette loi pour valoriser leur profession, pour la plus grande satisfaction de nombreux patrons qui rêvent de supprimer ces services médicaux.

Dans les grandes entreprises, les médecins du travail sont directement embauchés et rémunérés par les directions générales. En tant que chefs de service, ils sont souvent associés aux décisions sur la marche de l'entreprise. Si certains n'hésitent pas à soutenir des salariés contre leur hiérarchie sur les conditions de travail, et même à dénoncer des fautes de l'employeur, trop souvent leur proximité avec la direction limite leur indépendance, en fonction du niveau et de l'évolution de leur feuille de paye.

Par contre, dans les Services de santé au travail (SST) inter-entreprises, concernant le suivi de quatorze millions de salariés des PME-PMI et TPE, les médecins sont moins liés aux chefs d'entreprise et ils peuvent fournir plus aisément aux salariés les justificatifs et certificats d'incapacité de travail, d'accident et de maladie professionnelle permettant des recours. C'est cela que la loi veut restreindre.

Le projet de loi présenté par le gouvernement prévoyait que les SST seraient administrés systématiquement par un président patronal ayant voix prépondérante. Devant l'opposition des syndicats et des partis de gauche, les sénateurs de droite ont proposé, en séance, que cette présidence soit alternative tous les trois ans. Ce qui a entraîné l'abstention des élus PC, PG, PS et Verts... sur l'ensemble de la loi, alors que leurs partis s'étaient prononcés publiquement contre, le matin même.

Or, même alternatif, ce contrôle du patronat sur l'activité des Services de santé au travail est inacceptable. C'est aux salariés et aux médecins de diriger les contrôles sur les conditions de travail que les employeurs imposent. Mais les patrons veulent être juge et partie : « Qui paye, décide», proclament-t-ils.

De plus, cette loi introduit la perte officielle d'indépendance des médecins puisque, sur ordre des présidents des SST, les médecins pourraient être chargés d'actions prioritaires dans le cadre de « contrats d'objectifs », évidemment pas pour des investigations dans les PME où même les inspecteurs du travail n'arrivent souvent pas à mettre les pieds. Autant de missions qui éloigneront les médecins de leur travail de base : les consultations des salariés.

Plus grave, cette loi cherche à associer les médecins du travail à l'employeur dans la gestion des risques de santé dans l'entreprise, à choisir les priorités de sécurité à résoudre, en fonction d'un budget fixé par l'employeur. En cas d'accident ou de maladie professionnelle, elle vise à leur faire partager les responsabilités, qui sont normalement du seul ressort du patron, afin d'éviter à celui-ci une partie des poursuites juridiques.

De nombreuses associations de santé, de médecins du travail, de syndicats se prononcent avec raison contre cette loi, qui doit encore passer devant l'Assemblée nationale.

Partager