Affaire de l'attentat de Karachi : Léotard défend Balladur et charge Chirac02/02/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/02/une-2218.gif.445x577_q85_box-0%2C14%2C163%2C226_crop_detail.png

Leur société

Affaire de l'attentat de Karachi : Léotard défend Balladur et charge Chirac

Lundi 31 janvier, l'ex-ministre de la Défense du gouvernement Balladur en 1993-1995, François Léotard, a été entendu par le juge en charge d'une partie de l'enquête sur les causes de l'attentat de Karachi, qui a coûté la vie à onze salariés français en 2002.

Dans cette ténébreuse affaire, la question est de savoir quels types de commissions étaient prévus pour la livraison d'armes de la France au Pakistan et si leur non-versement a pu être la cause de l'attentat. C'est évidemment une question sur laquelle les familles, qui y ont perdu un parent ou un proche, aimeraient connaître la vérité.

Traditionnellement, le commerce des armes, comme bien d'autres commerces d'État à État, s'accompagne de commissions destinées à récompenser les différents intermédiaires qui ont pu intervenir, de chaque côté, pour permettre la conclusion de l'affaire. Cela fait partie du charme, ici très discret, du capitalisme.

Dans le contrat avec Karachi, le soupçon existe qu'il y a eu des commissions supplémentaires, des rétro-commissions destinées à financer la campagne électorale d'Édouard Balladur, l'« ami de trente ans » de Chirac qui, en 1995, avait tenté sans succès de lui souffler le fauteuil de président.

Le contrat d'armement en cause dans ces auditions était accompagné de 84 millions d'euros destinés à rémunérer les divers intermédiaires. Les comptes de campagne de Balladur font état de 2 millions d'euros en espèces, mais rien ne prouve, pour le moment, que tout ou partie de cet argent soit lié au contrat avec le Pakistan.

Selon Dominique de Villepin, secrétaire général de l'Élysée, et Charles Millon, ministre de la Défense de Chirac, celui-ci, informé des soupçons de rétro-commissions illégales, aurait mis un terme au versement des commissions des intermédiaires pakistanais.

Léotard, lui, est venu disculper les soupçons qui frappent Balladur et qui font également de l'ombre à Sarkozy, qui fut pendant deux ans son ministre du Budget et son porte-parole pendant la présidentielle de 1995. Léotard a nié l'existence de rétrocommissions au bénéfice de Balladur. Mais il a fait glisser la patate chaude vers Chirac, en se disant tout de même convaincu que l'attentat de Karachi était bien la conséquence de l'arrêt du versement des commissions prévues.

Il a fait aussi état d'un fait jusqu'alors négligé, qui aurait pu constituer un grief pour la partie pakistanaise : le fait que la France ait vendu à l'Inde des sous-marins plus modernes qu'au Pakistan.

Nul ne sait si la vérité sera un jour connue, mais il reste que onze salariés de la Direction des constructions navales y ont laissé leur peau. Et le fait que les personnes mises en cause se renvoient la balle tend à conforter l'idée que les dirigeants politiques français étaient plus occupés à régler des comptes entre eux qu'à en mesurer les conséquences.

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