Budget de la recherche : Pipeau pour les chercheurs, grosse caisse pour les banquiers12/01/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/01/une-2215.gif.445x577_q85_box-0%2C10%2C169%2C230_crop_detail.png

Leur société

Budget de la recherche : Pipeau pour les chercheurs, grosse caisse pour les banquiers

Il y a de cela un an, le gouvernement annonçait avec tambours et trompettes l'organisation d'un « grand emprunt national » dont les fonds seraient dédiés à la recherche et à l'enseignement supérieur. Les ministres parlaient de 32 milliards d'euros, une aubaine pour des laboratoires exsangues et des universités victimes de délabrement avancé. Les chiffres ont été revus à la baisse dans l'année, mais avec 11 milliards prévus pour l'enseignement et 8 autres pour la recherche, soit 19 milliards, certains chercheurs ou universitaires s'étaient mis à rêver. Pendant six mois, en tout cas, ils se sont mobilisés dans tout le pays pour constituer et déposer à temps les dossiers nécessaires à ces financements.

Las, dans les déclarations gouvernementales comme dans les contrats, il faut toujours soigneusement lire les petites lettres... Première très grosse ficelle, l'essentiel des fonds est déclaré non « consomptible ». Autrement dit, les instituts de recherche et les universités verront non pas la couleur de ces fonds, mais au mieux les seuls intérêts de leur placement bancaire. Leur taux a d'ailleurs été d'ores et déjà fixé à 3,45 % pour des placements sur dix ans. Nul besoin d'une calculette : au mieux ce ne sera en gros qu'un tiers des fonds annoncés qui sera donné à la recherche.

On avait parlé de 32 milliards, qui sont devenus 19, pour finalement n'être plus que 6,3 milliards. Mais comme la somme est répartie sur dix ans, cela ne fait plus que 630 millions par an qui seront donnés, ou plutôt rendus, aux labos et aux facultés ! Car l'Élysée avait prévenu : « Les intérêts de l'emprunt seront compensés par une réduction des dépenses courantes (qui) sera immédiatement engagée. »

Dès janvier 2010, un rectificatif budgétaire amputait ainsi la recherche et l'université de 500 millions d'euros, et en 2011 la réduction des financements des laboratoires se situera entre 5 %, comme à l'Inserm, et sans doute 10 %, notamment au CNRS. La part des universités devrait subir des coupes du même ordre. On « donne » ainsi 630 millions, mais on en vole plus de 500 : un vrai jeu de bonneteau ! Pire, sachant que l'argent du grand emprunt n'a pas encore été placé et que ses intérêts ne seront donc pas disponibles avant 2012 au plus tôt, le gouvernement aura même siphonné l'argent de la recherche pendant deux ans.

En revanche, certains se frottent les mains par avance à l'idée des multiples façons dont ils vont pouvoir se gaver avec cet argent « pour la recherche » : les banquiers. Pour eux, ces dizaines de milliards qui vont être investis sur dix ans, c'est autant de fonds spéculatifs mis à leur disposition pour la recherche... de profits ! Et avec des taux d'intérêt qui n'auront rien à voir avec les 3,45 % octroyés aux chercheurs - si jamais ceux-ci finissent même par en voir la couleur, car un dernier coup de Jarnac n'est jamais impossible avec un gouvernement de bonimenteurs.

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