États-Unis, 50 ans après la marche de Selma : le combat des Noirs n’est pas fini11/03/20152015Journal/medias/journalarticle/images/2015/03/p10004.jpg.420x236_q85_box-0%2C82%2C2878%2C1701_crop_detail.jpg

Dans le monde

États-Unis, 50 ans après la marche de Selma : le combat des Noirs n’est pas fini

À l’occasion du 50e anniversaire de la marche de Selma, petite ville de l’Alabama, Barack Obama a prononcé devant des milliers de personnes un discours sur le pont où, à l’époque, 600 manifestants du mouvement des Droits civiques avaient été violemment réprimés par la police. Les images d’hommes et de femmes en habits du dimanche matraqués et poursuivis par des cavaliers retransmises sur les chaînes nationales de télévision provoquèrent alors une énorme émotion dans l’ensemble du pays.

Illustration - le combat des Noirs n’est pas fini

Obama avait invité son prédécesseur à la Maison-Blanche, George W. Bush. La présence de cet ancien président républicain qui, entre 2000 et 2008, s’est fait le représentant des courants les plus à droite et les plus réactionnaires de la société américaine, a été critiquée par certains militants des mouvements noirs. Ainsi Diane Nash, connue pour avoir participé aux luttes des années 1960, s’est refusée à participer à la cérémonie anniversaire, expliquant : « Le mouvement de Selma était pour la non-violence, la paix, la démocratie, la justice et le droit de vote. Et George Bush est pour l’exact opposé. »

Obama a rendu hommage aux marcheurs de 1965 en déclarant que, grâce à leur combat, une « Amérique plus juste, plus inclusive, plus généreuse a triomphé ». Cette vision correspond si peu à la réalité de la société américaine d’aujourd’hui qu’Obama lui-même a été obligé, dans le même discours, de reconnaître que la marche contre le racisme aux États-Unis n’était « pas terminée ». Il a dû évoquer à plusieurs reprises les récents incidents à Ferguson, dans le Missouri, où en août dernier un jeune Noir sans arme avait été tué par un policier blanc.

La marche de Selma de 1965 avait pour objectif de faire reconnaître aux autorités racistes de l’État d’Alabama l’inscription des Noirs sur les listes électorales, droit légalement reconnu, mais nié dans les faits. Elle a été suivie de deux autres, menées par Martin Luther King, qui parvinrent finalement à imposer le vote d’une loi, le Voting right act, censée garantir le droit de vote aux Noirs. Mais cela ne suffit pas , et les Noirs durent se battre encore pour pouvoir user de leur droit de vote.

Ces marches furent les dernières grandes mobilisations non-violentes du mouvement des Droits civiques, qui combattait pour l’abrogation des lois instaurant une ségrégation raciale dans le sud des États-Unis. Ses militants et tous ceux qui se mobilisèrent dans ces années-là firent preuve d’un courage et d’une détermination qui permirent au mouvement d’atteindre son objectif.

Les dirigeants de ce mouvement limitaient leur lutte au seul terrain légal. Mais la fin de la ségrégation juridique ne mettait pas un terme aux inégalités sociales. Les Noirs des ghettos des grandes villes des États-Unis commencèrent à se révolter à partir de 1965, et eux n’étaient victimes d’aucune loi raciale. Ils subissaient l’oppression sociale qui pèse sur les plus pauvres dans le système capitaliste.

Finalement, si les mobilisations des Noirs des années 1960 ont permis certains progrès, elles ont surtout bénéficié à une petite bourgeoisie qui a pu accéder à des responsabilités, des places de maire ou même de président avec l’élection d’Obama en 2008. Mais, comme l’a souligné Obama lui-même dans son discours à Selma, le droit de vote est aujourd’hui encore remis en question dans certains États qui imposent des restrictions à l’inscription sur les listes électorales.

Et surtout la grande majorité des Noirs est toujours victime d’une véritable ségrégation sociale. Cinquante ans après la marche de Selma, les Noirs américains ont encore à continuer leur lutte pour leurs droits. Et, dans ce combat, ils ne peuvent rien attendre de politiciens comme Obama.

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