Pesticides agricoles et cancers : la longue lutte des victimes11/03/20152015Journal/medias/journalnumero/images/2015/03/2432.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Pesticides agricoles et cancers : la longue lutte des victimes

Le 9 mars, la Cour de cassation a annulé la condamnation de l’État à indemniser un agriculteur, céréalier en Meurthe-et-Moselle, qui avait développé en 2002 un cancer du sang dû à son exposition aux pesticides.

Un tribunal avait pourtant reconnu ce cancer comme maladie professionnelle en 2006. Puis la cour d’appel de Nancy avait validé en mars 2013 un jugement qui faisait le lien entre d’une part l’exposition aux pesticides et la maladie, d’autre part des infractions à l’étiquetage des produits de la part des fabricants de pesticides, « sans lesquelles [l’agriculteur] ne se serait pas exposé sans précautions et n’aurait pas développé cette pathologie ». La présence de benzène, la molécule cancérigène, n’était même pas mentionnée sur les étiquettes. Aucune précaution particulière n’était recommandée, il n’y avait que la mention « Attention aux irritations ».

C’était la première fois en France que l’État était condamné à indemniser ce type de préjudice, libre à lui de se retourner ensuite contre les fabricants de pesticides pour se faire rembourser. Cela aurait pu faire jurisprudence pour des dizaines de dossiers similaires actuellement en cours, qui concernent plusieurs centaines d’agriculteurs. Mais les magistrats parisiens ont décidé de casser ce jugement et de renvoyer l’affaire devant la cour d’appel de Metz, sous prétexte que « le respect par les fabricants de leurs obligations en matière d’étiquetage doit s’apprécier au regard de la réglementation applicable au moment de sa mise en circulation ».

Ce cas n’est pas unique, loin de là. Les agriculteurs atteints de cancers, probablement dus aux pesticides qu’ils ont employés pendant des années rencontrent les mêmes obstructions et les mêmes lenteurs quand ils essaient de les faire reconnaître comme maladies professionnelles. Ils doivent faire face à l’opposition des fabricants de produits phytosanitaires, pour la plupart de puissants trusts comme Bayer, BASF. Ils sont aussi confrontés à la mauvaise volonté des pouvoirs publics, qui ne sont pressés ni de créer des tableaux de maladies professionnelles permettant l’indemnisation automatique des malades, ni de demander des comptes à ces trusts et d’interdire tous les produits nocifs.

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