Géorgie - les élections du 1er octobre : Aucun changement pour la population03/10/20122012Journal/medias/journalnumero/images/2012/10/une2305.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Géorgie - les élections du 1er octobre : Aucun changement pour la population

Mikheïl Saakachvili, président de la Géorgie, un petit État du Caucase issu de l'Union soviétique, a fini par reconnaître que son parti, le Mouvement national uni, avait perdu les élections législatives face à celui du multi-milliardaire Bidzina Ivanishvili, le Rêve géorgien.

Malgré tout ce que permet le contrôle de l'appareil d'État, depuis priver Ivanishvili de sa nationalité au motif qu'il avait obtenu un passeport français en 2010, jusqu'à faire rafler les antennes satellitaires de peur que la propagande télévisée d'Ivanichvili ne touche les électeurs, en passant par l'achat de voix et le bourrage d'urnes, Saakachvili a dû s'avouer vaincu. Il faut donc croire que la victoire du camp adverse, indiscutable, a été bien plus importante que ne le laissaient entendre les résultats annoncés officiellement.

Depuis des mois, Saakachvili était donné vainqueur du scrutin à venir par les observateurs. En fait, les journalistes occidentaux et les représentants d'institutions internationales peignent sous des couleurs pimpantes son régime depuis ce qui a été appelé la révolution des Roses de 2003. Saakachvili avait alors accédé au pouvoir en renversant son prédécesseur Chevarnadzé, avec le soutien à peine discret des États-Unis. Mais si l'appui des grandes puissances ne lui a dès lors guère fait défaut, une grande partie de la population le vomissait depuis presque aussi longtemps.

Des manifestations massives ont régulièrement réclamé son départ. Fin 2007, de telles foules ont envahi les rues de Tbilissi, la capitale que le pouvoir dut décréter l'état d'urgence. C'est que, malgré ses promesses de lutte contre la corruption et la pauvreté, chacun peut voir que la situation ne s'améliore pas. Le chômage reste massif, la pauvreté éclatante, quand un instituteur ne gagne guère plus de 70 euros mensuels, quand les retraités crèvent littéralement de faim, que les campagnes végètent sans espoir, que de nombreux Géorgiens n'ont d'autre solution que de partir chercher de quoi vivre, en Russie notamment.

Saakachvili et son équipe ont tenté de faire oublier cette réalité à la population en la soûlant de discours guerriers. Mais cela s'est retourné contre eux. En août 2008, leur tentative de reconquérir par les armes l'Ossétie du Sud et l'Abkhazie, provinces indépendantes depuis vingt ans, s'est soldée par une défaite cuisante face à la Russie.

L'hostilité à la Russie et une attitude servile à l'égard de l'Amérique sont l'alpha et l'oméga de la politique étrangère du pouvoir. Ce dernier s'est glorifié d'être le second pourvoyeur de troupes de la coalition anti-Saddam en Irak, bien que la Géorgie ne compte que quatre millions d'habitants. Cela a mis à genoux son budget déjà pas brillant. Et cela n'a même pas permis à Tbilissi de se faire admettre dans l'OTAN, ni dans l'Union européenne, alors que Saakachvili s'était fait fort d'y parvenir.

Et mi-septembre, quand des télévisions ont montré des scènes de viol et de tortures dans les prisons, des centaines de milliers de personnes sont descendues crier leur haine du régime dans la rue.

Face à cela, Bidzina Ivanishvili a-t-il fait rêver, avec son parti du même nom ? Il faut espérer que non, car l'individu, devenu 153e fortune mondiale en montant un empire financier sur le pillage des ruines de l'Union soviétique, ne vaut sans doute pas mieux que son rival. D'ailleurs, ils se ressemblent en bien des points. L'un et l'autre sont des démagogues éhontés, sauf que les promesses de l'un ont eu amplement le temps de s'user. Leurs méthodes -- comme acheter les électeurs à grand renfort d'argent -- se ressemblent aussi. Sans oublier le fait que, si Saakachvili, avant de se faire le porte-parole en Géorgie des intérêts américains, avait fait ses études et débuté une carrière d'avocat à New York, Ivanishvili, après avoir a amassé des milliards en Russie, puis s'être établi en France pendant des années, est revenu chercher une bonne fortune politique en Géorgie. Mais qu'il ait été accusé par le pouvoir de se faire le porte-parole de Moscou n'a apparemment pas trop effrayé une majorité d'électeurs. Visiblement, ils craignaient surtout que Saakachvili n'en reprenne pour un tour.

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