La presse et l'élection présidentielle : Qui a parlé d'information ?14/03/20122012Journal/medias/journalnumero/images/2012/03/une2276.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

La presse et l'élection présidentielle : Qui a parlé d'information ?

Des représentants de grands journaux nationaux ou régionaux et de grandes chaînes mènent campagne contre les règles qui imposent d'accorder le même temps de parole à tous les candidats qualifiés pour le premier tour de l'élection présidentielle. Les mêmes reviennent à la charge dans une tribune libre publiée dans Le Monde daté du 14 mars.

Ces règles qui, à les entendre, leur sont imposées par le CSA -- en réalité, elles relèvent de lois votées par le Parlement et même de principes qui figurent dans la Constitution -- leur interdiraient de suivre la campagne électorale correctement. À d'autres ! Il y aura, on le sait aujourd'hui, au maximum douze candidats, c'est-à-dire le même nombre qu'en 2007. À partir du 1er janvier jusqu'au 20 mars, les règles imposaient aux télévisions et aux radios que les candidats soient traités selon l'équité, terme flou qui signifie, dans le sens courant, que la répartition soit juste. Mais certains journalistes et des responsables de rédactions, qui sont censés savoir ce que les mots veulent dire, en donnent leur propre interprétation.

Qu'on en juge. Si l'on prend les chiffres publiés par le CSA, du 1er janvier au 17 février, donc avant que le bilan de cette phase d'équité, qui se termine le 20 mars, puisse être établi, plus de 750 heures, toutes chaînes confondues, ont été consacrées à la campagne électorale. Sur la base de quinze candidats potentiels crédibles -- ce qui a été le cas -- l'égalité aurait dû se traduire par cinquante heures par candidat. On est très loin du compte. Sarkozy et derrière lui Hollande se partagent l'essentiel de ces 750 heures (308 heures à eux deux), suivent Le Pen, puis Bayrou. Quant à Nathalie Arthaud, elle a royalement disposé de six heures et demie. Mais ces chiffres ne prennent pas en compte des éléments comme l'audience, qui diffère considérablement d'une chaîne à l'autre. Une minute de diffusion sur TF1 ou France 2 n'est pas comparable à une minute sur une chaîne câblée.

Comme on peut le constater, les rédactions qui se plaignent des règles contraignantes ne se sont pas privées de prendre toute liberté pour faire leur choix avant que les règles d'égalité ne s'appliquent. Elles invoquent abondamment la légitimité, dans leurs commentaires, pour justifier leurs choix. Mais au nom de quelle légitimité tranchent-elles, jugent-elles et décernent-elles péremptoirement les bons et les mauvais points ?

Et elles ont l'aplomb de se plaindre des règles qu'on leur impose, qui constitueraient une entrave à leur liberté de choix, les empêcheraient d'informer les électeurs, nuiraient à la campagne auprès des citoyens !

On ne voit pas d'ailleurs en quoi le fait d'étaler cette période dite d'égalité sur cinq semaines, du 20 mars au 20 avril, veille du premier tour, leur rendrait la tâche plus difficile que d'être obligées de le faire sur deux semaines. À moins qu'il s'agisse de favoriser tel ou tel candidat. En toute objectivité et neutralité, bien sûr.

Heureusement que les militants ouvriers ne se laissent pas berner par les grands principes affichés au fronton des bâtiments publics, comme « liberté », « égalité », et ont su, à travers leur histoire, se doter de moyens de s'adresser à leur public, c'est-à-dire au monde du travail, pour compenser dans une certaine mesure les manquements revendiqués de ceux qui se sont approprié le droit à l'information.

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