Retraite à la suédoise : Loin du paradis...14/04/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/04/une2176.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Retraite à la suédoise : Loin du paradis...

En même temps que commencent les discussions sur la « réforme » des retraites, on entend beaucoup parler du système suédois, proposé par le Conseil d'orientation des retraites (COR) et par les médias comme un modèle dont il faudrait s'inspirer.

Mis en place dès 1998 et finalisé en 2001, après plusieurs années de débats d'experts et son adoption par tous les grands partis, il a remplacé l'ancien système par répartition, avec des pensions fixées d'avance, par un double système - répartition et capitalisation - où les cotisations sont définies, mais les pensions soumises à des fluctuations.

Le taux de cotisation est de 18,5 %, 16 % pour la retraite par répartition et 2,5 % pour la capitalisation, versés sur des fonds de pension au choix du travailleur ou, s'il refuse de choisir, sur un fonds géré par une agence gouvernementale. Chaque travailleur devient donc, qu'il le veuille ou non, un acteur de la Bourse et, par les temps qui courent, un perdant en Bourse.

Dans l'ancien système, le travailleur suédois devait avoir travaillé au moins trente ans, être âgé d'au moins 64 ans, pour avoir une retraite pleine calculée sur les quinze meilleures années. Dans le nouveau système, il faut avoir cotisé au moins quarante ans ; on peut partir entre 61 et 67 ans, voire à 70 ans, la moyenne effective étant de 65 ans. Quant à la pension, elle repose sur le calcul du cumul des cotisations travailleur-employeur. C'est un capital « virtuel », puisque les cotisations versées tout au long de sa vie par un travailleur servent pour l'essentiel à financer les retraites par répartition. Ce montant global virtuel est réparti en mensualités, calculées sur un certain nombre d'années, en fonction de l'espérance de vie moyenne de la classe d'âge du travailleur au moment où il décide de partir. Elle est revalorisée selon un index lié à l'évolution de la masse salariale calculée sur trois ans et selon l'évolution des prix.

Autrement dit, plus la situation de l'emploi est florissante et la masse salariale importante, plus on a de chances de garder un certain pouvoir d'achat, ce qui a été le cas durant les premières années de la réforme. Mais en temps de crise, tout change. Et quand les ressources des caisses de retraite sont insuffisantes, un mécanisme de correction automatique intervient pour rétablir l'équilibre, aux dépens du « capital virtuel » accumulé et des pensions versées.

Restent les retraites complémentaires, établies dans le cadre d'accords collectifs d'entreprise, et les fonds privés de retraite individuelle. Sur une main-d'oeuvre globale de 4,3 millions de personnes, 1,9 million de Suédois auraient décidé d'y recourir.

Ce système qu'on nous vante tant n'a donc rien d'un paradis. Selon un syndicaliste suédois de l'enseignement, même l'Agence suédoise de sécurité sociale reconnaît qu'avec le nouveau système, l'employé moyen aura une bien plus petite pension qu'avec l'ancien (55 à 60 % du revenu final, au lieu de 60 à 65 %). Et en ce début d'année 2010, le gouvernement a annoncé aux retraités une baisse des pensions de 3 %.

Un économiste suédois officiel a attribué l'impopularité du nouveau système auprès du public à une « mauvaise communication », alors que, selon lui, il avait pourtant réussi à « replacer un programme d'assurance sociale très populaire, (...) mais non viable économiquement, dans une structure financière viable ». On ne peut avouer plus crûment qu'on a fait passer la logique du profit avant le bien-être de la population. Pas de quoi s'étonner si on est « impopulaire ».

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