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- Lutte ouvrière n°2166
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Leur société
De l'absence de logis au logement surpeuplé, 10 millions de mal logés
Dans son rapport annuel sur « l'état du mal-logement en France », le quinzième du genre, la Fondation Abbé-Pierre souligne que « nombreux sont les responsables politiques, y compris au plus haut sommet de l'État, qui tendent à minorer ses effets, alors que la crise du logement est bien antérieure à la crise financière puis économique qui ont submergé le monde à partir de l'été 2008 ; alors que ni ses manifestations ni ses causes n'ont été traitées » (souligné par la Fondation).
La Fondation Abbé-Pierre note que des millions de ménages s'estiment de mieux en mieux logés du fait notamment qu'entre 1970 et 2006 la surface disponible par personne a doublé (40 m2 par personne aujourd'hui) et que les équipements sanitaires se sont multipliés. Mais, malgré ces progrès, 80 % des personnes estiment cependant qu'il reste difficile de trouver un logement, et pour 37 % c'est même « très difficile ».
Cela concerne, chaque année, trois millions de familles, locataires ou accédants à la propriété. Il s'y ajoute 1,2 million de demandeurs de logements sociaux en attente d'une réponse et les nombreuses personnes vivant dans des situations précaires ou indignes : hébergement dans des structures d'accueil ou chez des tiers, camping, forme dénaturée d'habitat comme la caravane ou la voiture. Et, selon la Fondation, cette situation ne peut que s'aggraver dans la mesure où la crise économique est en train d'augmenter la précarité, et donc d'affecter la progression des revenus, ainsi que la durée du chômage, c'est-à-dire tout ce qui barre la route à l'accès au logement.
Au total, à côté de quelque 3,5 millions de personnes en situation de mal-logement (allant de la situation de SDF à celle de personnes logés dans des conditions très difficiles, voire en attente d'une expulsion), il y a quelque 6,5 millions de personnes en situation de fragilité à court ou moyen terme (copropriétés dégradées, situation d'impayés ou de surpeuplement, hébergement chez des tiers).
Apparu, le ministre du Logement, qui essayait ces jours-ci d'atténuer le mauvais effet produit par ce rapport, prétend que le gouvernement actuel a fait mieux que ses prédécesseurs en matière de construction de logements. Ce n'est pas ce que constate l'économiste spécialisé Michel Mouillart, cité par le rapport. Selon lui, le manque de construction a représenté 150 000 logements pour les années 2008 et 2009, portant le déficit de logements neufs à 900 000 logements pour le quart de siècle écoulé. Il constate aussi que l'offre de ce que l'on appelle des « logements sociaux » stagne autour de 450 000 logements et que l'offre locative privée a diminué de 500 000 logements.
En conclusion, le rapport pointe du doigt la responsabilité des pouvoirs publics. Il évoque enfin un « aveuglement » ou un « manque de conviction » des gouvernants qui n'auraient pas pris conscience de la nécessité d'une intervention publique forte et durable en matière de logement. Mais, en fait, le gouvernement sait ce qu'il fait. C'est en toute connaissance de cause qu'il donne la priorité aux aides au patronat et serrent de plus en plus les budgets sociaux : santé, éducation, transports ou logement.