Pacifique Sud : la militarisation en marche06/12/20232023Journal/medias/journalnumero/images/2023/12/2888.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Pacifique Sud : la militarisation en marche

Mardi 5 décembre, alors que se tenait à Nouméa la réunion annuelle des ministres de la Défense du Pacifique Sud, plusieurs centaines de manifestants ont protesté dans les rues « contre la militarisation de la Kanaky ».

Cette réunion des ministres de la Défense qui existe depuis 2013 regroupe sept États de la région dotés d’une force militaire, Australie, Nouvelle-Zélande, Fidji, Papouasie Nouvelle-Guinée, Tonga, Chili et France. La France y participe au titre de sa présence en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie et des 2 850 soldats qu’elle y maintient. C’est la première fois qu’elle la préside en la personne du ministre Lecornu, et c’est l’occasion pour l’impérialisme français de pousser une nouvelle fois ses pions dans cette région du monde où la rivalité entre les grandes puissances s’intensifie.

Si à l’ordre du jour se trouvent des sujets comme le réchauffement climatique, les catastrophes naturelles ou encore la lutte contre la pêche illicite, qui ont peu à voir avec la Défense, c’est bien d’influence stratégique qu’il s’agit. Outre ses forces militaires, ses avions, ses bateaux, l’impérialisme français joue, pour exister dans le Pacifique Sud, la carte de « l’équilibre », de la « troisième voie », entre Chine et États-Unis, proposant son parrainage aux petits pays qui ne veulent pas officiellement choisir entre les deux grands. La France appuie ses offres de service sur les 13 milliards d’euros de la loi de programmation militaire qui, d’ici 2030, seront consacrés à l’outre-mer. Elle compte aussi proposer aux États insulaires un nouveau service, l’académie militaire, pour entraîner leurs soldats, ce qui s’ajoute aux exercices militaires conjoints pour lier leurs armées à celle de la France.

Cependant la concurrence est rude. La Chine, qui s’est insérée sur le terrain délaissé un temps par les États-Unis, a réussi à signer l’an dernier un accord de sécurité avec les îles Salomon. Les Jeux du Pacifique qui s’y sont tenus jusqu’au 2 décembre ont été l’occasion pour elle de s’y mesurer à l’Australie, proche alliée des États-Unis. La Chine a offert aux îles Salomon un stade, une piscine, des terrains de tennis pour 120 millions de dollars. Mais surtout, alors que celles-ci n’ont pas d’armée, Chine et Australie ont rivalisé dans le déploiement de leurs forces de police au nom du » maintien de l’ordre » pendant les Jeux.

Si les États-Unis ont délaissé la région ces dernières années, ils la réinvestissent maintenant massivement. Fin septembre, lors d’un sommet avec l’ensemble des îles du Pacifique Sud, outre l’ouverture de trois nouvelles missions diplomatiques, ils leur ont annoncé 200 millions de dollars d’aide de plus, venant s’ajouter aux 600 millions programmés sur les dix ans à venir. Et ils ont, quoi qu’en disent les ministres français, le poids décisif dans la région.

Tout cela n’empêche pas Lecornu de se faire représentant de commerce pour le compte de Naval Group. Il essaiera au retour de Nouméa de vendre aux Philippines et à la Malaisie quelques sous-marins et bateaux militaires.

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