Niger : l’UE payait pour la chasse aux migrants06/12/20232023Journal/medias/journalnumero/images/2023/12/2888.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Niger : l’UE payait pour la chasse aux migrants

La junte militaire au pouvoir au Niger a abrogé le 27 novembre une loi datant de 2015, qui criminalisait le passage de migrants par sa frontière nord vers l’Europe. Dictée à l’époque par l’Union européenne (UE), cette loi avait pour but de placer des barrières avant même le Sahara et de sous-traiter cette question à un pays pauvre.

En 2015, les dirigeants de l’UE avaient décidé une politique dite d’externalisation de ses portes d’entrée migratoires. Un « fonds fiduciaire d’urgence pour l’Afrique » fut mis en place, dont le Niger devint le principal bénéficiaire. Des centaines de millions d’euros parvinrent à son gouvernement de l’époque, qui coupa les principales routes migratoires et lança une chasse aux migrants et à tous ceux qui les aidaient. Des centaines de Nigériens de villes de passage comme Agadez furent jetés en prison sous le prétexte d’être des passeurs. Le nombre de personnes débarquant en Italie diminua l’année suivante. Mais personne ne sait combien moururent en empruntant d’autres routes dans le désert, moins surveillées et plus dangereuses.

L’UE chercha ensuite d’autres gouvernements prêts à mener la même politique. Ses dirigeants scellèrent un accord avec Erdogan en 2016, lui offrant six milliards d’euros pour qu’il se charge de dresser des camps et d’y retenir des millions de Syriens en Turquie. Dans le même temps, une collaboration fut mise en place avec les chefs de guerre qui avaient pris le pouvoir en Libye. De nombreux migrants ont témoigné des sévices infâmes que les milices libyennes leur font subir de façon systématique.

Le gouvernement nigérien actuel, parvenu au pouvoir suite à un coup d’État en juillet, se donne une image d’opposant face à la France, et refuse désormais de continuer à servir de sous-traitant de cette politique criminelle en matière de migrations.

La réaction de la commissaire aux Affaires intérieures de l’UE, Ylva Johansson, à l’annonce de la rupture de la collaboration par le Niger, est parfaitement révélatrice. « Je suis très préoccupée, et il y a un risque énorme que cela provoque de nouveaux décès dans le désert », a-t-elle osé affirmer… pour exprimer ensuite son véritable souci : «Il y aura probablement plus de gens qui vont essayer de traverser la Méditerranée. » Tel est bien le cynisme de ces dirigeants européens commanditaires des crimes commis contre les migrants.

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