Gabon : au cœur de la Françafrique06/09/20232023Journal/medias/journalarticle/images/2023/09/P7-1_Total_pompe_Afrique_OK_Lupo.jpg.420x236_q85_box-0%2C181%2C424%2C419_crop_detail.jpg

Dans le monde

Gabon : au cœur de la Françafrique

Le putsch du mercredi 30 août au Gabon a renversé le président Ali Bongo, quelques heures après la proclamation de sa réélection, à l’issue d’un scrutin vraisemblablement truqué comme au Mali, au Burkina Faso et au Niger. Ses initiateurs s’appuient sur le rejet dans la population de la politique de pillage de l’impérialisme français.

Illustration - au cœur de la Françafrique

Il est cependant rapidement apparu que le nouveau président, le général Oligui Nguema, cousin d’Ali Bongo et responsable de sa Garde présidentielle jusqu’au coup de force, n’avait pas l’intention de mettre en question la présence française dans ce pays d’Afrique centrale de 2,4 millions d’habitants. Il a tout de suite dit qu’il ne remettrait pas en cause les engagements internationaux du Gabon. Après la condamnation d’usage, les autorités françaises se sont donc accommodées de cette succession. Oligui Nguema n’est pas plus soucieux de démocratie que son prédécesseur. Il n’a ainsi prêté aucune attention au candidat concurrent d’Ali Bongo, qui lui demandait simplement de procéder à un décompte officiel des voix, ce qui lui aurait vraisemblablement donné la victoire. Le chef de la junte entend bien rester au pouvoir, promettant juste une transition à durée indéterminée qui lui permettra de mettre la main sur les richesses que l’impérialisme daigne laisser à ses serviteurs locaux.

Pour 3 milliards de chiffre d’affaires en 2022, quelque quatre-vingts sociétés françaises sont présentes au Gabon, comme Air France, Eiffage et Colas dans les travaux publics, Air liquide pour le gaz industriel, CMA CGM dans le transport maritime, ainsi qu’un fonds d’investissement dans les infrastructures, Meridiam.

Depuis l’indépendance, l’histoire du Gabon est inséparable de l’exploitation pétrolière qui a enrichi Elf, devenu aujourd’hui Total­Energies, qui continue à pomper l’or noir du pays et à y exploiter des stations-service. Le Gabon n’est peut-être plus le fleuron pétrolier qu’il était du temps du père Bongo, mais il reste une manne pour des sociétés d’extraction de second rang, spécialisées dans le rachat de gisements en fin de vie, comme Perenco, propriété de la famille Perrodo, 15e fortune française.

La grande affaire semble toutefois être désormais l’extraction du manganèse dans les mines de Moanda, les plus importantes du monde, qui ont fait du pays le deuxième producteur mondial de ce minerai essentiel à la fabrication des batteries des véhicules électriques. C’est la multinationale française Eramet qui l’extrait et le convoie à travers le pays et en fait profiter ses actionnaires.

« La Françafrique est morte depuis longtemps », vient de répéter Catherine Colonna, la ministre des Affaires étrangères. Le Gabon reste largement sous la coupe de grands groupes capitalistes français, qui exploitent une population parmi les plus pauvres du monde. La présence permanente de quelque 400 soldats français au Gabon illustre la continuité de cette politique impérialiste.

Si les affaires et l’exploi­tation du pays au profit de sociétés françaises ne sont pas troublées par les putschistes, nul doute que le nouveau régime, sans les Bongo, recevra l’estampille démocratique de la République française et les récompenses sonnantes et trébuchantes qui vont avec.

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