Aéroports de Paris : C'est Byzance... pour les actionnaires22/03/20122012Journal/medias/journalnumero/images/2012/03/une2277.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Aéroports de Paris : C'est Byzance... pour les actionnaires

La société ADP (Aéroports de Paris), qui détient et exploite quatorze aéroports en France, dont Roissy, Orly et Le Bourget, vient de mettre la main sur le premier opérateur aéroportuaire de Turquie, TAV, et du même coup sur l'aéroport Atatürk d'Istanbul, avec 37,5 millions de passagers par an.

Douze aéroports gérés par TAV en Turquie, mais aussi en Tunisie, Macédoine, Géorgie et Lituanie, tombent ainsi dans l'escarcelle d'ADP qui ne cesse de s'étoffer. Récemment, ADP a raflé l'aéroport croate de Zagreb, après celui d'Amman en Jordanie et un autre sur l'île Maurice, et plusieurs encore, dont certains en Chine et au Mexique. Cette société détient 37 plates-formes aéroportuaires de par le monde, soit un cumul de 180 millions de passagers, avec les redevances et retombées diverses que génère un tel trafic.

ADP intervient dans le domaine des prestations aéroportuaires (gestion de trafic aérien, stationnement des avions, infrastructures, etc.), qui représente les trois quarts de son chiffre d'affaires. Mais il construit aussi des aéroports. Il possède également un vaste parc immobilier d'hôtels, de bureaux, de dizaines de milliers de boutiques hors taxes et autres commerces dans les aérogares. ADP tire aussi ses revenus de l'assistance en escale : manutention des avions, passage des bagages, contrôle des passagers.

La récente grève des agents de sûreté aérienne a jeté une lumière crue sur la façon dont ADP sous-traite cette activité à des sociétés sélectionnées pour lui coûter le moins possible, avec comme conséquence que des milliers d'agents de sûreté, travaillant en fait pour le richissime ADP, touchent parfois moins que le smic pour un emploi éreintant.

Quant aux redevances aéroportuaires qu'empoche ADP (pour qu'un avion ait le droit d'atterrir ou de décoller avec des passagers, de stationner sur site, d'accéder aux jetées et passerelles d'embarquement...), elles représentent une bonne part et parfois plus de la moitié du prix du billet acquitté par le passager.

On le voit, si nombre de compagnies aériennes vont mal, ou le prétendent, les grands opérateurs aéroportuaires en tout cas se portent très bien.

Ancien établissement public, ADP a été partiellement privatisé en 2006. Depuis, l'État ne détient plus que la moitié du capital, un bon quart appartenant à des propriétaires institutionnels, le reste à des particuliers, dont une très faible part de salariés. Dès la première année, et c'était le but de la privatisation, ADP a vu son chiffre d'affaires et surtout ses bénéfices doubler. Et si, avec la crise financière de 2008, ses résultats se sont un peu tassés, ils lui ont quand même permis d'acheter 38 % du capital de TAV sur ses fonds propres.

Le PDG d'ADP dit attendre de cette opération un « retour d'investissement à deux chiffres » dès 2013. Les 11 à 15 % de profits par an qu'il promet à ses actionnaires sont à l'image d'une économie capitaliste en crise, où ce qu'on appelle investissement consiste surtout à s'emparer de parts de marché, en l'occurrence des parts du marché aéroportuaire mondial.

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