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États-Unis : nouvelle faillite bancaire
Le 1er mai, la First Republic Bank (FRB), théoriquement assise sur 175 milliards de dollars de dépôts, a fait défaut. C’est la troisième faillite de ce type aux États-Unis en quelques semaines.
C’est la troisième fois que l’État et les plus grandes banques sont contraints d’intervenir pour juguler la panique, la troisième fois que les banquiers, le gouvernement et la presse annoncent que c’est fini, qu’il n’y a plus rien à craindre, que le système financier est sauvé, sain et fiable.
Ces trois déroutes bancaires découlent du même phénomène. Des banques locales se sont développées depuis quelques années, jouant sur le crédit gratuit proposé par la banque centrale (Fed) et la levée des restrictions règlementaires imposées aux établissements financiers après la crise de 2008. Elles ont attiré l’épargne croissante des acteurs des nouvelles technologies, concentrant leurs dépôts et leur proposant des rendements élevés et des prêts à des tarifs défiant toute concurrence. Ces banques, comme leurs sœurs du monde entier et avant tout comme les grandes puissances de Wall Street, prêtaient à intérêt les fonds que l’État leur avançait gratuitement. Et, comme toutes les banques, elles permettaient à leurs actionnaires de participer au prorata de leur capital au grand banquet des exploiteurs.
Mais, même pour les petits malins, les beaux jours n’ont qu’un temps. Devant les risques d’emballement de l’inflation, la Fed, en accord avec le gouvernement et après avoir consulté les grands banquiers, a commencé à relever le taux du crédit. Il est passé en quelques mois de 0 à 5 et bientôt 5,25 % pour les prêts à court terme. Cela a immédiatement bloqué la pompe à finances des petits établissements bancaires et suscité la méfiance de leurs déposants, qui ont commencé à vider leurs comptes.
Ainsi, en une semaine, la First Republic Bank a dû se procurer 100 milliards de dollars pour faire face aux retraits de ses déposants. Ne pouvant plus se financer auprès de la Fed, elle a été contrainte de vendre à perte des actifs, accélérant la panique de ses clients et de ses actionnaires. L’action de FRB a perdu 97 % de sa valeur, jusqu’à ce que l’administration déclare la banque en faillite.
JPMorgan, la plus grande banque américaine, a repris pour une bouchée de pain ce qu’il reste des actifs et des affaires de FRB, arrêtant ainsi la panique. Le prétendu sauveur fait une excellente affaire. Son président évalue à plus de deux milliards de dollars le bénéfice d’une opération entièrement organisée et garantie par l’État fédéral. La Bourse ne s’y est pas trompée et l’action de JPMorgan a pris 2,5 %. Les gros poissons mangent les petits et les grandes banques ramassent les mises des petits bourgeois avides d’argent facile. Rien de plus banal depuis que les banques existent.
Pourtant, l’épisode révèle l’impasse où se débat la Fed et, derrière elle, l’ensemble des institutions financières et politiques du monde impérialiste. Depuis des dizaines d’années, et plus encore depuis la crise financière de 2008, les États ont arrosé les marchés financiers, comptant sur l’argent facile pour faire tourner l’économie et maintenir les profits au plus haut.
Ils ont ainsi constitué une gigantesque bulle de capitaux circulant à la vitesse d’Internet, en quête permanente de rendement. Désormais, continuer l’argent facile c’est alimenter la spirale inflationniste. Arrêter l’argent facile, c’est risquer de déclencher une crise immédiate, comme le montre le contrecoup instantané des faillites des petites banques américaines sur les Bourses mondiales et sur les autres banques.
Mardi 2 mai, la panique consécutive à la faillite de FRB était circonscrite. « Jusque-là tout va bien », affirment ceux qui prétendent diriger le monde. C’est aussi ce que disait un homme tombant d’un gratte-ciel en passant devant la fenêtre du onzième étage.