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Dans le monde
Mayotte : la chasse aux pauvres continue
Vendredi 28 avril, Gérald Darmanin a affirmé que l’opération Wuambushu « continuera le temps qu’il faudra ». Mayotte, le 101e département français, île séparée artificiellement de l’archipel des Comores, vit donc sous l’état d’exception.
1 800 gendarmes et policiers sont mobilisés en vue de la destruction en deux mois de 1 000 cases, sous prétexte d’insalubrité, de l’expulsion de milliers de clandestins et de la « lutte contre la délinquance » en arrêtant 60 bandes criminelles.
La première destruction de bidonvilles devait démarrer dans la matinée du 25 avril mais elle n’a pas eu lieu. La juge des référés du tribunal de Mamoudzou a ordonné au préfet de cesser toute expulsion et démolition, exigeant des lieux de stockage pour les biens des personnes expulsées ainsi qu’une garantie de relogement, toutes choses que l’État est manifestement incapable de fournir. La destruction de 1 000 cases, sur les dizaines de milliers de cases des bidonvilles de Mayotte, mettrait 5 000 personnes à la rue, alors que le parc d’urgence est limité à 2 000 places et à 21 jours.
Le gouvernement a subi un autre revers, mais cette fois du côté des expulsions. Le gouvernement de l’Union des Comores, qui regroupe les trois autres îles, a annoncé qu’il ne laisserait pas descendre des bateaux les Comoriens expulsés qui n’ont pas de carte d’identité, ce qui est le cas de la plupart d’entre eux. Pour montrer malgré tout sa détermination, le préfet a expulsé sept Malgaches, trois Sri-Lankais. Il annonce aussi celle de ressortissants de pays d’Afrique de l’Est.
Sur l’île, les gendarmes se livrent à une véritable opération militaire. Les déplacements de leurs blindés et les manœuvres d’hélicoptères ont laissé penser à des jeunes que les gendarmes se préparaient à les expulser de leur quartier. Cela a donné lieu à plusieurs batailles rangées, une occasion de surenchérir pour des politiciens. Les Comoriens sont qualifiés de cafards et le vice-président du conseil départemental de Mayotte a qualifié ces jeunes de terroristes, ajoutant : « Il faut peut-être en tuer. » Trois manifestations de soutien à l’opération Wuambushu ont eu lieu, rassemblant plusieurs milliers de personnes. Une partie des Mahorais sont excédés par le fait que leurs terres sont occupées par des squatteurs, que leurs voitures sont vandalisées et leurs enfants rackettés. Mais cette insécurité est le fruit de la politique de l’État, de sa défaillance en matière d’infrastructures comme des expulsions de Comoriens, qui privent nombre d’enfants de leurs parents. 80 % des habitants de l’île vivent sous le seuil de pauvreté et les bidonvilles sont peuplés d’autant de Mahorais que de Comoriens. Mais il est plus facile pour l’État français et pour les démagogues de Mayotte d’embrigader des pauvres contre d’autres pauvres, au prétexte d’une indépendance et d’une nationalité qu’ils ont fabriquées et imposées.
La population de Mayotte est dans une impasse. Face aux expulsions et aux démolitions, les Comoriens vont devoir se défendre contre la gendarmerie et peut-être aussi contre ces Mahorais qui se disent prêts à agir eux-mêmes contre les Comoriens. Déjà de nombreux habitants ne sortent plus de chez eux, se cachent de peur de se faire arrêter ou d’être pris à partie.
Pour maintenir sa présence et sa zone maritime, l’impérialisme français avait construit une poudrière. Aujourd’hui, la mèche est allumée par la politique de l’État, les appels aux meurtres des politiciens, la surenchère de Darmanin qui, comme le dit un Mahorais, veut remplacer Le Pen dans les cœurs.