Allemagne : Une parodie de justice... 64 ans après23/09/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/09/une2147.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Allemagne : Une parodie de justice... 64 ans après

Le 8 septembre, au cours de sa dernière séance avant les élections à venir, le Bundestag, le Parlement allemand, a abrogé tous les jugements contre les prétendus « criminels de guerre » prononcés... par la justice militaire nazie. Soixante-quatre ans après la fin de la Deuxième Guerre mondiale et l'écroulement du régime national-socialiste, ses dernières victimes vont donc être réhabilitées.

Il avait déjà fallu attendre 2002 pour que les déserteurs de la Wehrmacht, les objecteurs de conscience et les soldats accusés de lâcheté devant l'ennemi le soient. Mais à l'époque les « criminels de guerre » avaient été exclus de la décision parce que les politiciens de droite craignaient que soient réhabilités par la même occasion des soldats qui, par leur comportement, auraient « nui » à d'autres de leurs camarades. Le gouvernement de gauche de l'époque (dans lequel cohabitaient les sociaux-démocrates et les Verts) s'était incliné. Jusqu'à aujourd'hui, il ne pouvait donc y avoir de réhabilitations que pour des cas individuels.

Les historiens estiment que la justice militaire nazie a prononcé au total, entre 1934 et 1945, au moins 30 000 condamnations à mort, dont 20 000 ont été suivies d'exécutions. Nombre de ceux qui n'ont pas été exécutés ont été envoyés dans les camps de concentration et y sont morts des traitements subis. Et il y a eu, pour les mêmes raisons, des dizaines de milliers de condamnations à des peines de prison. Dans la plupart des cas, les victimes étaient de simples citoyens, qui avaient aidé des Juifs, qui s'étaient exprimés de façon critique contre le régime hitlérien, qui avaient transmis des informations aux Alliés, ou encore des soldats ayant traité de façon trop favorable des prisonniers de guerre. Leur attitude courageuse démontre d'ailleurs que le peuple allemand n'a pas soutenu unanimement Hitler et sa politique, mais bien plutôt qu'il a été, lui aussi, victime d'une dictature féroce.

Les survivants de ces procès ont été délaissés et, pour beaucoup d'entre eux, calomniés après la guerre. En revanche, pour reconstruire son appareil d'État après 1945, la bourgeoisie allemande a eu recours à tout un personnel politique qui avait déjà servi sous Hitler. Si on a organisé des procès à grand spectacle (comme celui de Nuremberg) contre les hauts dignitaires nazis, de nombreux exécutants, et pas toujours des moindres (juges, procureurs, bourgmestres, commissaires de police...), ont été utilisés dans la haute administration dès le début de la Guerre froide, en 1946-1947. En 1955, lorsque la République Fédérale Allemande s'est dotée d'une armée nouvelle, la Bundeswehr, elle a fait appel à un certain nombre d'anciens officiers de la Wehrmacht pour en constituer les cadres.

La décision de réhabilitation qui vient d'être prise arrive très tard, alors que la plupart des personnes concernées sont aujourd'hui décédées. Mais, au fond, son principal mérite est de faire ressortir sur quel tas de fumier a été bâtie l'Allemagne dite démocratique d'après-guerre.

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