Acier en fusion, emplois qui fondent23/02/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/02/une-1702.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Acier en fusion, emplois qui fondent

Usinor, Arbed et Aceralia viennent d'annoncer leur projet de fusion, fusion qui reste subordonnée à l'accord des autorités européennes, lequel semble ne devoir être qu'une simple formalité. Ces trois sociétés comptent parmi les plus importantes de la sidérurgie européenne et même mondiale. Car si Usinor est "français", Arbed "luxembourgeois" et Aceralia (qui dépend d'Arbed) est "espagnol", en réalité l'ensemble est présent en Europe, Amérique du Nord et du Sud, ainsi qu'en Asie.

La nouvelle société, baptisée provisoirement NewCo, sera la première du monde dans cette branche et emploiera 110 000 personnes... pour le moment. Car le PDG d'Usinor, Francis Mer, a déclaré qu'il allait y avoir des suppressions d'emplois, et "la fermeture d'usines ou de morceaux d'usines". Mais, a-t-il ajouté, "rien à voir avec les grandes restructurations des années soixante-dix et quatre-vingt". Et il a dit qu'il n'y aurait pas de licenciements, mais simplement moins d'embauches que de départs à la retraite.

Quoi qu'il en soit, ce seront de toute façon une nouvelle fois les emplois qui diminueront, et les profits des actionnaires qui s'accroîtront. D'ailleurs, à l'annonce de ce projet de fusion, la Bourse a aussitôt bondi en ce qui concerne les valeurs des trois sociétés.

Depuis une trentaine d'années la sidérurgie française n'a cessé de se regrouper ou, parfois, au contraire, de céder des usines, dans un immense monopoly capitaliste. Actuellement Usinor est devenu un écrasant monopole qui produit environ 85% de l'acier dans le pays. A partir des années 1974-1976, les entreprises sidérurgiques, frappées par la crise, et qui accumulaient pertes et dettes, ont été sauvées grâce à l'intervention massive de l'État. Le "plan acier" de 1977 a entraîné l'injection de dizaines de milliards en faveur des patrons sidérurgistes, pendant que des dizaines de milliers d'ouvriers étaient licenciés, après s'être durement battus, et avoir parfois gagné un petit pécule de départ. En 1978, il y avait, de fait, une quasi-nationalisation de l'acier en France. En novembre 1981 (gouvernement Mauroy) l'État a pris le contrôle d'Usinor et de Sacilor, l'autre grand de l'époque. Et après avoir fait partir les neuf dixièmes des travailleurs et avoir complètement renfloué cette branche sur les deniers publics, Usinor-Sacilor (qui avaient fusionné en 1987 pour s'appeler en définitive... Usinor en 1997) a été privatisé en 1995.

L'État a donc reconstruit à ses frais la sidérurgie pour la recéder une vingtaine d'années après, au secteur privé. Aujourd'hui les capitalistes de l'acier font des profits : on estime que le résultat d'exploitation de la nouvelle société NewCo sera de 8% du chiffre d'affaires consolidé, lequel serait de l'ordre de 200 milliards de francs.

Pour les capitalistes, c'est "bon appétit messieurs !". Et pour les travailleurs, un travail dur, dangereux, avec toujours la crainte de pertes d'emplois. Et toutes ces opérations se sont faites en maintenant toujours le même cap en faveur des patrons, à travers tous les gouvernements de droite comme de gauche, et avec le plus souvent la participation active de ces derniers.

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