Réfugiés : Les politiciens français et l'affaire des réfugiés kurdes : hypocrites, démagogues et salauds23/02/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/02/une-1702.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans le monde

Réfugiés : Les politiciens français et l'affaire des réfugiés kurdes : hypocrites, démagogues et salauds

Finalement le gouvernement socialiste s'est décidé, mardi 20 février, à autoriser les 910 réfugiés kurdes d'Irak dont le bateau avait échoué sur la côte varoise, à quitter la zone d'attente où ils étaient parqués ; une solution qui de toute façon n'était pas viable sans écorner les protections légales auxquelles les réfugiés kurdes ont droit. Ceux-ci peuvent donc maintenant faire une demande d'asile dans des conditions plus normales.

La position prise, qui vient semble-t-il de Jospin, évite pour l'instant au gouvernement de s'enferrer dans une situation intenable, qui aurait consisté à garder les réfugiés sous clé ou à essayer de les expulser le plus vite possible. Mais c'était pourtant bien dans cette direction que s'étaient engagés spontanément les principaux responsables politiques, notamment socialistes, dès qu'ils avaient appris la nouvelle de l'échouage de l'East Sea sur les côtes françaises.

Chirac tout comme le ministre de l'Intérieur socialiste, Daniel Vaillant, avaient bien dénoncé à l'unisson les trafiquants de main-d'oeuvre, ce qui évidemment ne leur coûtait pas cher. Chirac menaçait de "sanctionner les responsables qui font commerce de la misère d'autrui", tandis que Vaillant expliquait que "la France fera tout ce qu'elle pourra pour être efficace contre ces exploiteurs de la misère humaine que sont les passeurs". Seguin, l'un des (nombreux) prétendants à la mairie de Paris, comme son compère Devedjian, avait profité du fait qu'il est dans l'opposition pour montrer, en paroles, un peu de générosité : "La France doit les considérer comme des réfugiés et pas comme des clandestins. Il est évidemment hors de question de les faire repartir".

Mais Pasqua, qui a déjà largement contribué dans le passé à aggraver les conditions faites ici aux travailleurs immigrés, est resté égal à lui-même : "S'il s'agit de réfugiés économiques, il est évident que nous ne pouvons pas les garder.", a-t-il dit. S'il s'agissait de réfugiés politiques, il proposait de suivre le dédale des procédures administratives.

Et, pour marquer sa différence à droite, le même Pasqua a dénoncé la "générosité" des hommes de son camp : "Il y a malheureusement parmi les élus de la droite, la recherche permanente de la mode. Ils pensent que c'est bien de se montrer humanitaire, généreux, etc. Naturellement, c'est très beau mais le problème n'est pas là. (...) La responsabilité de l'Etat est de ne pas accueillir toute la misère du monde, comme disait Michel Rocard".

Même son de cloche pour François Hollande, le secrétaire du Parti Socialiste qui, en réagissant à chaud, avait lancé qu'il n'était pas question de "donner l'espoir d'une intégration", en précisant : "Il faut avoir l'humanité de les soigner, de les accueillir et de les mettre dans la possibilité de rentrer dans leur pays d'origine". Bref, on les accueillerait pour les mettre en état... de repartir "dans leur pays", sans même que Hollande semble s'être demandé quel pouvait bien être ce "pays" pour les réfugiés kurdes irakiens ; c'était une version à peine allégée de la version des frères ennemis de l'extrême droite, Le Pen et Mégret, exigeant "le retour, dans les plus brefs délais, de ces malheureux clandestins vers leur port d'embarquement".

Dans ce tintamarre de déclarations nauséabondes, Kouchner aura une fois encore emporté la palme de l'hypocrisie : "Nous devons, nous les Européens, continuer à faire la différence entre les réfugiés politiques, - et c'est peut-être leur cas - et les migrants économiques qui ne risquent, en rentrant chez eux, que de reprendre leur vie misérable. J'ai bien sûr honte de dire cela". Il a honte, prétend-il, mais il le dit quand même et il ne quitterait surtout pas le gouvernement si celui-ci le prenait au mot.

Il faut en effet être bien hypocrite, démagogue et salaud - ensemble ou séparément - pour prétendre qu'un pays riche d'Europe occidentale ne peut pas accueillir dignement 910 réfugiés kurdes, et même beaucoup d'autres, dans la situation desquels une puissance impérialiste comme la France porte d'ailleurs une écrasante responsabilité. Et le faire, ce ne serait après tout que rendre une très infime parcelle de ce que les puissances impérialistes ont pillé et volé au fil des siècles aux peuples des régions les moins développées de cette planète, et de ce qu'elles ont saccagé par leurs interventions militaires.

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