Europe : Quand le parlement européen fait du social... c'est d'abord pour les patrons !23/02/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/02/une-1702.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans le monde

Europe : Quand le parlement européen fait du social... c'est d'abord pour les patrons !

Il y avait un menu varié pour la séance plénière de février du Parlement européen : la reconstitution du stock de cabillaud en mer d'Irlande, les compléments alimentaires, la sécurité maritime, les véhicules à deux roues, trois roues et quatre roues (ici, de plus de huit places), l'avenir de la recherche scientifique, etc. Plusieurs textes plaidaient pour accélérer la privatisation des services publics (en même temps qu'ils dénonçaient le système actuel de retraites). Le clou de la semaine était une résolution à l'origine de laquelle on trouve le président de la commission "emploi et affaires sociales", Michel Rocard.

Les députées de Lutte Ouvrière avaient obtenu un temps de parole lors de la discussion qui a précédé cette résolution intéressant au premier chef les travailleurs et qui concernait ce que son rédacteur nomme pudiquement les "conséquences sociales des restructurations industrielles" c'est-à-dire, en langage moins diplomatique, les licenciements qui continuent à frapper les travailleurs de grands groupes industriels, qui regorgent pourtant d'argent, comme Danone, Michelin, Aventis, Bull, Alstom, Moulinex et bien d'autres. Dans la discussion, la commissaire en charge de l'Emploi et des Affaires sociales a d'ailleurs indiqué que dans la période récente, sur une durée d'un mois, 5 000 emplois ont disparu à la suite de rachats de sociétés.

Rien pour empêcher les licenciements dans les entreprises qui font des profits

La résolution n'entendait pas cependant "proposer la moindre mesure contraignante" pour empêcher les licenciements. Armonie Bordes dans son intervention a dénoncé cette résolution : "Hors de l'interdiction de toute suppression d'emploi dans les grandes entreprises qui font du profit, le reste n'est que bavardage". Elle a aussi affirmé la solidarité des députées Lutte Ouvrière avec "les travailleurs de ces entreprises qui luttent pour parer les coups qui leur sont portés", et qui ont "choisi la seule voie efficace dans cette économie où seule règne la loi de la jungle".

Le texte de la résolution du Parlement était tellement anodin qu'il a été adopté aussi bien par une partie de la droite et de la gauche socialiste, des Verts et même du groupe de la GUE (c'est-à-dire les Partis Communistes et les Verts de gauche ; groupe auquel les députés LO et LCR sont techniquement associés) et cela alors que l'adoption au cours du vote de certains amendements, comme celui renforçant la liberté de décision du grand patronat, la rendait encore plus inacceptable. La résolution prétendait ménager l'emploi en cas de fusions entre groupes capitalistes. Au bout du compte, elle ménagera... les patrons.

La presse a évoqué la directive sur la dissémination des OGM (organismes génétiquement modifiés) contre laquelle ont voté Arlette Laguiller, Armonie Bordes et Chantal Cauquil, les députées de Lutte Ouvrière. Elles ont expliqué qu'il ne s'agissait pas de "voter contre la recherche dans le domaine agricole ni contre les scientifiques effectuant ces recherches", se démarquant ainsi de ceux qui s'opposent aux OGM pour des raisons réactionnaires, mais d'en dénoncer la commercialisation future : "Ces recherches sont inévitablement utilisées par les trusts de l'agro- alimentaire dont ils renforçent d'ailleurs la domination sur l'agriculture". Des trusts auxquels "nous ne faisons absolument pas confiance", ont-elles dit, car leur "action est exclusivement motivée par la recherche du profit maximum". Toute l'affaire des farines animales a montré également que ces trusts agissent sans contrôle sérieux, ce que nous avons également dénoncé.

Droits des auteurs ou profit des éditeurs ?

Autre sujet qui a fait couler de l'encre : les droits d'auteur sur les supports type internet. Les trois députées Lutte Ouvrière ont estimé, tout en soutenant la défense des droits d'auteur, que celle-ci sert aussi à masquer les intérêts des grandes entreprises d'édition de disques, de livres, de CD-rom, les patrons des médias et de l'internet qui prélèvent leurs profits sur les auteurs et au détriment des consommateurs, souvent tenus à l'écart de la culture par le coût des produits culturels. Elles ont donc voté pour les amendements en faveur des auteurs et du public, amendements dont certains leur avaient d'ailleurs été signalés par la CGT.

Parfois un compromis entre la droite et les socialistes prend l'eau

Une fois n'est pas coutume, on a vu capoter le rapport Bullman, qui réaffirmait pourtant une fois de plus les orientations économiques européennes, notamment imposer de plus en plus de privatisations au détriment des services publics. En effet, un amendement des libéraux exigeant plus encore de libéralisation de l'économie n'ayant pas été adopté, ceux-ci ont annoncé qu'en représailles ils ne voteraient pas ce rapport, à qui ces voix ont donc manqué. Au grand dam d'un rapporteur socialiste qui avait cherché depuis des mois, et cru trouver, un compromis avec la droite.

Echec également du rapport Ceyhun censé gommer les aspects les plus révoltants des initiatives françaises en matière de répression de l'immigration illégale pour en faire une politique d'immigration acceptable par l'ensemble des Etats membres. Ce rapport a finalement buté sur les contradictions d'un monde politicien habitué à manier la démagogie anti-immigrés en même temps qu'il satisfait les exigences du patronat en matière de main-d'oeuvre.

Les députées de Lutte Ouvrière avaient dénoncé ceux qui se contentent de "pointer du doigt les sordides trafiquants d'esclaves des temps modernes", pour "mieux laisser dans l'ombre ceux dont ils sont les agents recruteurs : grande industrie, géants du bâtiment et nombre de patrons de moindre envergure". Elles avaient, bien entendu, voté les amendements atténuant ou supprimant le caractère répressif des propositions françaises.

Enfin, deux interventions sur l'Afrique, l'une sur la Guinée et l'autre sur la situation actuelle au Congo ont permis de prendre position contre ceux qui, à droite comme à gauche, se permettent de donner des leçons de démocratie aux différentes bandes armées qui opèrent dans la région en passant complètement sous silence les responsabilités, passées et présentes, des puissances impérialistes à commencer par celle de leur propre pays, dans une situation souvent tragique, et dont beaucoup de représentants "sont, aujourd'hui encore, mêlés à des réseaux, politiques ou affairistes, pour tirer profit de l'Afrique".

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