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Mali : La guerre est loin d'être finie
Loin d'être pacifiées, les villes du Nord reprises aux groupes armés intégristes restent peu sûres. Dimanche 10 février, des hommes du Mujao ont ouvert le feu de l'intérieur du commissariat de Gao. Les combats ont duré de longues heures entre les intégristes islamistes et les troupes maliennes, avant que l'armée française ne bombarde et détruise complètement le bâtiment. Les habitants, terrorisés, se sont enfuis précipitamment du marché voisin et se sont retranchés dans leurs maisons. Les jours précédents, deux attentats-suicides avaient touché la ville. Dans les villages proches, les combattants des groupes intégristes n'ont jamais fui, et se cachent, attendant visiblement le moment opportun pour repasser à l'action.
Les témoignages continuent à affluer sur les exactions commises par l'armée malienne à l'encontre des populations arabes ou touareg, soupçonnées d'être alliées aux combattants islamistes. À Gossi, une localité située au sud de Gao, la presse a relaté comment des maisons avaient été pillées et des personnes emmenées sans que l'on sache ce qu'elles étaient devenues. Une partie de ceux que leur peau trop claire désigne pour cible à ces actes de vengeance ont préféré s'enfuir.
Enfin, pendant que la guerre continue au nord du pays, les différents groupes de l'armée malienne règlent leurs comptes à Bamako à coups de fusil. Vendredi 8 février, les habitants de la capitale ont pu entendre des coups de feu qui ne venaient pas de djihadistes, mais de deux unités de soldats maliens. Les « bérets verts », proches du capitaine Sanogo et de la junte qui a renversé en mars 2012 le président Amadou Toumani Touré, encerclaient le camp de Djicoroni où sont casernés les « bérets rouges », l'ancienne garde rapprochée du président déchu. L'affrontement s'est soldé par deux morts et six blessés graves.
Ces combats rappellent que derrière les dirigeants officiels du Mali, le président, le Premier ministre, la réalité du pouvoir est plutôt dans les casernes. Le 30 avril 2012, les bérets rouges avaient tenté un contre-coup d'État qui avait été déjoué. De leur côté, le 11 décembre 2012, les bérets verts du capitaine Sanogo avaient démis de ses fonctions le Premier ministre Cheikh Modibo Diarra pour le remplacer par Diango Cissoko. Même si la présence des troupes françaises oblige aujourd'hui ces cliques militaires à se faire un tout petit peu plus discrètes, elles n'en restent pas moins l'élément déterminant du pouvoir au Mali. Et si les djihadistes ont pu facilement prendre position au nord du Mali, c'est parce que cette armée malienne est bien plus préoccupée de régler ses comptes ou de racketter la population que de risquer sa vie pour défendre celle-ci.
Après le soulagement provisoire qu'une partie de la population malienne a pu éprouver en voyant partir les groupes djihadistes, c'est donc peut-être à de nouvelles exactions qu'elle doit s'attendre de la part de ses « libérateurs » français ou maliens et à un chaos croissant.