Scionzier, vallée de l'Arve (Haute-Savoie) : Un décès qui ne doit rien à la fatalité05/09/20122012Journal/medias/journalnumero/images/2012/09/une2301.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Scionzier, vallée de l'Arve (Haute-Savoie) : Un décès qui ne doit rien à la fatalité

Lundi 27 août, à la reprise du travail de l'après-midi, les ouvriers d'une petite usine de décolletage de Scionzier découvraient le corps sans vie de leur patron. Il était intervenu dans la machine à laver les pièces. Celle-ci permet de les dégraisser après leur usinage, à l'aide d'un produit chimique très toxique : le trichloréthylène.

L'enquête de gendarmerie et l'autopsie ont clairement mis en évidence une intoxication mortelle suite à l'inhalation de ce produit.

Beaucoup pensent que le « trichlore » est interdit depuis longtemps car il n'est plus en vente pour les particuliers (pour tout produit en contenant plus de 0,1 %) et qu'il a été retiré dans la plupart des grosses entreprises où il était largement utilisé, par exemple dans tous les services de Maintenance mécanique.

Mais en fait il a continué en toute légalité à être utilisé dans l'industrie, la législation actuelle se contentant de conseiller son remplacement. C'est ainsi que 4 500 tonnes sont utilisées chaque année dans l'industrie française.

Il est largement employé dans les usines de décolletage de la vallée de l'Arve où plus de 500 entreprises, en grande partie de très petites entreprises et des PME, constituent le premier pôle mondial de décolletage (usinage de pièces mécaniques à l'aide de tours multibroches automatisés à très haut rendement). Ces entreprises travaillent toutes en sous-traitance, au plus grand profit des donneurs d'ordre, des grands groupes de l'automobile, de l'électronique, de l'aéronautique et autres.

Dans les faits, les groupes ont en somme « déplacé » le problème que constitue le remplacement du trichloréthylène, qui signifierait des investissements pour d'autres procédés de dégraissage, vers ces petites entreprises qui n'ont pas les mêmes moyens et où, par ailleurs, les patrons ne peuvent même pas supporter les mots de « Code et inspection du travail » ou, pire, de « syndicat ».

À juste titre la CFDT locale, suite à l'accident mortel, réclame l'interdiction du trichloréthylène car rien qu'en Haute-Savoie entre 8 000 et 10 000 salariés travaillent dans le décolletage, c'est un véritable poison pour le système nerveux central, qui attaque la peau et les muqueuses. Il est classé comme « cancérigène probable » au niveau européen... alors qu'au moins une vingtaine d'études font un lien direct avec le cancer, en particulier celui du rein. Mais la législation avance moins vite que les exigences de rentabilité capitaliste. Quitte, comme dans ce cas, à entraîner la mort d'un homme.

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