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Leur société
Justice de riches : Les délinquants financiers mieux protégés que les innocents d'Outreau
Entre 2007 et 2008, le nombre de dossiers confiés à des juges d'instruction, en ce qui concerne les délits financiers, a considérablement baissé.
Le pôle d'instruction de Paris avait été saisi de 101 affaires nouvelles en 2006, de 88 en 2007 ; le chiffre est tombé à 21 en 2008 et à 9 depuis le début de l'année 2009. C'est à croire que la délinquance financière se volatiliserait par miracle ! Il n'y a pas même eu besoin de la baguette magique de Sarkozy : l'évaporation s'est faite avant même qu'il ait annoncé la fin du juge d'instruction, et alors qu'aucune loi n'a encore été votée.
Le procès Elf, ou les affaires de la mairie de Paris à l'époque où Chirac en était le maire, ne sont donc plus qu'un souvenir : à l'avenir, de telles choses désagréables aux affairistes devraient être évitées le plus souvent possible. Certains juges d'instruction, à l'instar d'Eva Joly ou de Renaud Van Ruymbeke, mettent de la mauvaise volonté à enterrer des affaires dont ils avaient la charge ? Eh bien, on leur retire le pain de la bouche. « On », c'est le procureur, sous l'autorité du procureur général, lui-même nommé en Conseil des ministres.
C'est ainsi que les affaires les plus récentes ne font plus l'objet d'une « instruction », mais d'une « enquête préliminaire » dans laquelle les procureurs sont maîtres du dossier et peuvent prendre tout leur temps. C'est le cas par exemple de la plainte à l'encontre de la société de travaux publics Vinci et de son ancien président Antoine Zacharias pour « délit d'initié » et « abus de biens sociaux », ou des « abus de confiance » dans les affaires Natixis-Caisses d'Épargne et Bernard Madoff-BNP Paribas.
Le plus sordide dans cette histoire, c'est que cette perte de pouvoir du juge d'instruction intervient après l'affaire d'Outreau, où l'un d'eux avait laissé croupir des innocents en prison, ses décisions catastrophiques étant confirmées par plusieurs autres magistrats. Suite notamment aux travaux de la commission créée après cette affaire, une réforme de la justice est annoncée, dont la suppression du juge d'instruction serait un des aspects. Mais rien ne garantit que cela empêchera à l'avenir la justice de précipiter des gens du peuple dans un carcan comparable à celui d'Outreau.
En revanche, avant même que le moindre texte soit gravé dans le marbre, les grands bénéficiaires des soi-disant « leçons d'Outreau » sont des capitalistes et des politiciens qui, non contents d'user de toutes les voies légales pour s'enrichir sur le travail d'autrui, sont des délinquants aux yeux mêmes de la loi mais peuvent se payer le luxe de l'impunité.