Haïti : cynique effet de manche de Hollande20/05/20152015Journal/medias/journalnumero/images/2015/05/2442.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Haïti : cynique effet de manche de Hollande

Lors de l’inauguration du Mémorial ACTe, ce nouveau grand lieu d’expression de la mémoire de la traite et de l’esclavage, à Pointe-à-Pitre, François Hollande a déclaré dans son discours que la France s’acquitterait de sa dette envers Haïti, propos salués par une ovation debout de l’assistance. Hollande faisait là allusion aux 159 millions de francs qu’en 1825 la France de Charles X a contraint Haïti à payer. Il s’agissait de rembourser les colons et la France de la perte des esclaves, après leur victoire militaire sur l’armée française et l’indépendance de l’île acquise en 1804.

Aussitôt après, interrogé à ce sujet, Hollande devait déclarer qu’il s’agissait pour lui surtout d’une dette morale et non financière. Et d’ajouter que le geste de la France serait de participer à l’effort en faveur de la scolarisation gratuite, à hauteur de 50 millions d’euros à travers l’agence française de développement.

Évidemment, ce retropédalage de Hollande aura déçu et mis en colère beaucoup d’Haïtiens et d’autres personnes qui avaient pris à la lettre son discours de Pointe-à-Pitre. Car ces 159 millions de francs or, réduits à 90 millions sous Louis-Philippe, équivalent aujourd’hui à 17 milliards d’euros. Il faut savoir que cette dette exigée par la France avec la menace de représailles militaires et d’un retour à l’esclavage a été intégralement payée par l’État haïtien qui, pour l’honorer, a fait subir au peuple de l’île des efforts surhumains et d’énormes privations. L’État haïtien n’a fini de payer la dette exigée par la France et ses intérêts d’emprunt... qu’au cours des années 1950.

Cette lourde dette est une des causes de l’appauvrissement extrême du pays et de la misère qui y règne, même si elle n’est pas la seule. Comme si les revenus énormes tirés de la traite des Noirs et de l’esclavage pendant plus de deux siècles n’avaient pas suffi à l’État français et à sa bourgeoisie !

Pourtant, personne n’avait demandé à Hollande de déclarer que la France allait réparer cette dette. Il a simplement voulu faire un effet à bon compte en commémorant les crimes de l’esclavage le 10 mai à Pointe-à-Pitre. Ce faisant, sa déclaration et la suite qu’il lui a donnée sont apparues comme une nouvelle tromperie, une nouvelle humiliation publique pour le peuple d’Haïti. C’est un cynique effet de manche, basé sur ce qui a suscité un pillage et une exploitation sans borne, sanguinaire, du peuple haïtien par l’État français. Comment oser créer de faux espoirs aux dépens d’un peuple et d’un pays aussi pauvres ?

Plusieurs dizaines d’Haïtiens ont d’ailleurs manifesté leur colère lors de la présence de Hollande et de Martelly, le président actuel d’Haïti, devant la statue de Toussaint Louverture. Hollande n’aura fait montre envers Haïti que d’une hypocrisie de plus, dans la longue série de celles des gouvernants français qui ont jalonné l’histoire de ce pays.

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