Bouclier fiscal : Jackpot pour les millionnaires22/07/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/07/une2138.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Bouclier fiscal : Jackpot pour les millionnaires

Le rapport parlementaire qui vient d'être rendu public sur le bilan du bouclier fiscal est éloquent : les cent plus gros bénéficiaires de la mesure (sur un total de 18 900) captent, à eux seuls, un tiers des remboursements !

Le bouclier fiscal est une disposition de la loi de finances qui interdit au fisc d'imposer un contribuable à plus de 50 % de ses revenus. On se souvient que lors de sa mise en place, à l'été 2007, le gouvernement avait tenté de faire passer cette annonce pour une mesure sociale. Il évoquait alors le sort des malheureux « chômeurs ou retraités » qui, possesseurs d'une maison de famille sur l'île de Ré, étaient frappés par l'impôt sur la fortune alors qu'ils avaient des revenus inférieurs à 1 000 euros par mois.

Que l'État cherche à remédier à ce type d'aberration, pourquoi pas. Mais il est évident aujourd'hui que le but du bouclier fiscal n'était pas celui-là, et que ses principaux bénéficiaires sont bien loin d'être des gens dans le besoin.

Le fisc rembourse directement aux bénéficiaires le « trop-perçu », c'est-à-dire l'équivalent de ce qu'ils ont payé sur leur imposition au-delà des 50 %. Ce sont très exactement 18 893 ménages qui ont touché un chèque en 2008, pour un montant total de 578 millions d'euros.

Mais ces chiffres globaux masquent d'énormes disparités : les 100 restitutions les moins importantes - touchant, par exemple, des « personnes au chômage depuis plusieurs années » ou des « agriculteurs ayant subi une mauvaise récolte » - ont été en moyenne de ... 25 euros. À l'autre bout de l'échelle, comme le dit le rapport Carrez, « un petit nombre de personnes concentre une part très importante du coût de la mesure ». Qu'en termes élégants ces choses-là sont dites ! En langage plus direct, cela signifie que quelques centaines de multimillionnaires se sont goinfrés grâce à un très gros chèque offert par l'administration fiscale : les 100 plus gros bénéficiaires ont touché chacun, en moyenne, 1,15 million d'euros ; autrement dit, 0,53 % des bénéficiaires ont touché presque 30 % des remboursements ! Les dix plus gros bénéficiaires, eux, ont carrément touché le jackpot, avec une moyenne de 6 millions d'euros par tête.

Qui sont ces heureux élus ? Des contribuables qui, aux dires du rapport, « ont un patrimoine supérieur à 15,5 millions d'euros ». On le voit, ils avaient donc bien besoin de ce petit coup de pouce !

Ce qui est encore plus écoeurant, c'est que nombre de ces super-riches ont, en revanche, un « revenu fiscal de référence » très en-dessous du RMI : le rapport pointe du doigt (sans méchanceté) les propriétaires de patrimoines supérieurs à 15,5 millions d'euros mais déclarant des revenus annuels inférieurs à 3 200 euros. Il s'agit ici, évidemment, de contribuables ayant la possibilité de profiter de tous les artifices comptables offerts par la loi pour déduire leurs revenus jusqu'à n'être quasiment plus imposables. À ceux-là, qui volent le fisc en toute légalité, l'État offre donc un petit cadeau supplémentaire pour les féliciter.

Voilà donc la vision de la « justice sociale » dont Sarkozy nous abreuve à longueur de discours.

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