Lutte contre le travail illégal : sinistre plaisanterie du ministre24/05/20232023Journal/medias/journalnumero/images/2023/05/2860.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Lutte contre le travail illégal : sinistre plaisanterie du ministre

Le ministère du Travail a dévoilé le 23 mai son Plan national de lutte contre le travail illégal pour les cinq années à venir. Il fournit ainsi quelques chiffres : l’an passé il y aurait eu près de 7000 infractions donnant lieu à des poursuites, dont les trois quarts pour travail dissimulé, et quelques raisons de se révolter.

Le ministère compterait s’attaquer en premier lieu au travail dissimulé lors des grands événements sportifs, comme les Jeux olympiques et la Coupe du monde de rugby. Mais qui donc met en place et supervise ces compétitions, depuis la construction d’équipements jusqu’à l’encadrement du flot de spectateurs, si ce n’est l’État ? L’administration ferme les yeux voire légalise la sous-traitance en cascade et donc finalement le travail dissimulé sur les chantiers des JO où cinq travailleurs ont déjà laissé leur vie. Le recrutement de bénévoles pour encadrer les visiteurs, les sportifs, les festivités est favorisé par les pouvoirs publics. D’une main l’État aide les Bouygues, Vinci, TF1 et les autres à profiter du travail illégal et du bénévolat dissimulé, de l’autre il sévira peut-être contre les marchands de glaces à la sauvette aux abords des stades.

Le deuxième chantier est la lutte contre les faux statuts, favorisés en particulier par les plates-formes de mises en relations. Les sites Uber et autres Deliveroo, qui offrent des tarifs de famine à des chauffeurs et des livreurs prétendument indépendants, sont visés sans être nommés. Mais qui donc les a couvés, promus, protégés et légalisés ?

En troisième lieu le Plan prétend s’attaquer au travail dissimulé partout où il s’en trouve, en multipliant les contrôles. On se demande bien comment, étant donné que Dussopt, l’actuel ministre du Travail, et ses prédécesseurs ont fait tout leur possible pour réduire à pas grand-chose l’Inspection du travail.

Au-delà des balivernes ministérielles, le Plan montre qu’il y a une prolifération du travail illégal, c’est-à-dire en clair du nombre des employeurs qui ne respectent même pas les dernières lois en vigueur. C’est le résultat d’une politique. Depuis des dizaines d’années patronat et gouvernements se sont efforcés de détruire les protections légales dont disposaient une partie des travailleurs. Il s’agit de revenir à la condition première du prolétaire, la précarité, la concurrence entre ouvriers, la solitude devant l’employeur, avec la multiplication de situations indignes que cela suppose. Mais qu’on se rassure, le Plan gouvernemental ­promet de « faire accéder la France au statut de pays pionnier pour un partenariat mondial contre le travail des enfants, le travail forcé, la traite des êtres humains et l’esclavage contemporain ».

Voilà un beau programme et qui en dit long sur la situation en 2023 dans un pays considéré comme parmi les plus avancés.

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