C'est leur dette, mais c'est à nous qu'ils voudraient la faire rembourser !16/12/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/12/une2159.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Editorial

C'est leur dette, mais c'est à nous qu'ils voudraient la faire rembourser !

Après l'émirat de Dubaï, voici un autre État qui est menacé de faillite. Cette fois, il s'agit de la Grèce, un État de l'Union européenne, qui plus est de la zone euro. C'est que l'État grec est endetté jusqu'au cou. Les banquiers et les organismes financiers commencent à s'inquiéter de la capacité de l'État grec à rembourser ses dettes.

Le moins qu'on puisse dire, c'est que la Grèce n'est pas le seul État endetté jusqu'au cou. Tous les États le sont, même les plus grands et les plus puissants, à commencer par les États-Unis. Ils l'étaient déjà avant la crise financière actuelle. Mais les sommes colossales dépensées par tous les États pour sauver la mise à leurs banquiers et aux actionnaires des grandes entreprises, confrontées au recul de leurs marchés, les ont obligés à multiplier les emprunts et donc à s'endetter toujours davantage.

Comme dit l'adage, on ne prête qu'aux riches et, avec un même niveau d'endettement, les États pauvres ont plus de mal à continuer à emprunter que les États riches, et ils doivent payer des intérêts plus élevés. D'autres États de l'Union européenne, l'Irlande, le Portugal et même l'Espagne, seraient en train de suivre la Grèce sur la liste des pays considérés comme mauvais payeurs.

Mais, derrière cette première ligne d'États menacés de faillite, il y en a une seconde, dont ferait partie la France. La Grèce ne serait donc qu'une hirondelle annonçant, non pas le printemps, mais plutôt une tempête hivernale sur le monde financier et sur l'économie mondiale !

C'est pour voler au secours des banquiers que les États ont aggravé leur endettement. C'est auprès des banquiers qu'ils cherchent à emprunter pour combler les trous de leur budget. Et les banquiers prêtent bien volontiers... moyennant intérêts. Ce qui est une dette pour les États, et une raison de pressurer davantage leur population, est une source de profit pour les capitalistes qui prêtent.

Sarkozy vient d'annoncer comme une grande réalisation le grand emprunt de 35 milliards d'euros. Mais cela enchaîne un peu plus encore le budget de l'État à l'intérêt des banquiers. « Cela permettra de financer la recherche », ose-t-il se vanter. Mais ce serait au budget de l'État de financer la recherche... s'il n'était pas vidé pour aider les banquiers !

Le remboursement de la dette publique est déjà le deuxième poste de dépense du budget. Plus il y a d'argent à verser aux banquiers, moins il en reste pour les écoles, les hôpitaux, les transports publics ou la recherche.

Entre les financiers et les services publics, il faut choisir : la France, comme tous les grands États, a choisi les financiers.

Voilà pourquoi tous les services publics se dégradent. Voilà pourquoi on ne veut pas remplacer un agent du service public sur deux partant à la retraite, alors pourtant que le nombre de chômeurs ne cesse d'augmenter ! Voilà pourquoi le gouvernement est en train de privatiser La Poste.

Et voici que l'endettement lui-même devient un nouveau terrain pour la spéculation. Tout en reprochant à la Grèce d'être au bord de la faillite, tous les spéculateurs spéculent contre ce pays. Ils donnent ainsi à un État au bord du précipice la poussée qui le fera définitivement tomber.

La seule médication proposée par les institutions du monde financier pour empêcher la faillite de l'État grec est qu'il fasse encore des économies, qu'il s'engage dans une politique d'austérité draconienne, c'est-à-dire qu'il s'en prenne encore plus aux classes exploitées et rende leur vie encore plus difficile pour que la finance continue à prospérer.

Le pillage financier avec la complicité de l'État complète le durcissement de l'exploitation dans les entreprises. Mais c'est toujours au profit du même grand capital. Ce sont les mêmes grands bourgeois qui répartissent leur argent entre l'industrie et la finance, avec une préférence croissante pour cette dernière.

Regardons la Grèce, car il y a là la préfiguration de ce qui nous attend ici, en France. La crise a déjà coûté très cher aux classes exploitées. Elle coûtera toujours plus cher dans les mois qui viennent. À moins qu'une explosion sociale puissante casse cette mécanique bien huilée.

Arlette LAGUILLER

Éditorial des bulletins d'entreprise du 14 décembre

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