Toyota : Le cynisme des dirigeants patronaux20/03/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/03/une1807.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Toyota : Le cynisme des dirigeants patronaux

Le Financial Times du 3/3/2003 interviewait M. Kosuke Shiramizu, membre de la direction de Toyota, troisième firme automobile mondiale.

On pouvait y lire que "l'usine française de Valenciennes avait une productivité supérieure de 20% à celle de l'usine anglaise". Et aussi: "En France, il y a de nombreux chômeurs et, du coup, ceux qui ont un travail ont tendance à travailler plus durement". Ou bien que les Américains du Nord sont "assez riches et donc ne veulent pas trop travailler. (...) Les Thaïlandais se révélaient bien plus volontaires pour s'adapter à des tâches différentes alors que les Anglais étaient bien plus routiniers et avaient tendance à faire du "sur place"". Ou encore: "Au Japon, nous voyons de plus en plus de gens qui ne veulent plus travailler comme avant. Ils se dispersent et ont adopté des attitudes européennes."

Le journal signalait que "les statistiques et l'opinion de nombreux experts de l'industrie automobile semblent s'inscrire en faux" contre ces déclarations et la direction générale de Toyota prenait quelques précautions: "Toyota a la plus grande considération pour tout son personnel et tient à lui faire savoir que les déclarations qui ont été faites ne reflètent ni la réalité, ni l'opinion de Toyota Motor Company."

Mais ce qui est certain, c'est que les conditions de travail et l'ambiance imposées par la direction à Toyota Onnaing, près de Valenciennes, sont très proches de celles décrites il y a trente ans par un syndicaliste japonais dans Toyota, l'usine du désespoir. La méthode Toyota, c'est le stress maximum permanent: toujours plus de productivité, toujours courir, la pression permanente des petits chefs, des temps de travail supplémentaires fréquents annoncés seulement deux heures avant la fin de poste, de nombreux licenciements arbitraires, des postes de travail inadaptés entraînant de graves tendinites au bout de quelques mois et de nombreux accidents du travail, et bien sûr des salaires faibles avec des primes à la tête du client.

Cette usine regroupe maintenant 2700 salariés, dont 500 intérimaires. La Yaris se vendant bien, la production augmente constamment, la direction espère arriver à imposer la production de 400 véhicules par équipe avant les congés d'été. Alors la charge de travail ne cesse d'augmenter, les postes de travail sont surchargés, les cadences insoutenables, les pannes se multiplient ainsi que les heures supplémentaires! Certaines semaines, avec les dizaines de minutes supplémentaires quotidiennes, plus le samedi, l'horaire de travail (y compris les pauses légales) frôle les 50 heures et les dépasse largement en comptant les temps d'habillage et de déshabillage. Et ces semaines se renouvellent souvent.

En deux ans, 300 salariés ont démissionné, malgré le chômage qui frappe la région, et 200 ont été licenciés sous divers prétextes futiles. Ainsi le quart de l'effectif des années 2001-2002 a été renouvelé.

Avec de telles méthodes d'exploitation, Toyota fait de gros profits: 5,2 milliards d'euros en 2002 pour 180000 salariés dans le monde, soit 2 400 _ (15000F) de bénéfice officiel par salarié par mois, c'est-à-dire pratiquement le double du salaire brut mensuel de la majorité des ouvriers Toyota d'Onnaing (1250 e).

Alors tant mieux si les travailleurs japonais ont adopté ce que le n°3 de Toyota appelle "des attitudes européennes" -ce qui veut sans doute dire moins d'heures de travail, des cadences plus faibles et moins de soumission à la hiérarchie- et vivement que les travailleurs de Toyota du Valenciennois adoptent ces attitudes japonaises modernes qui ne semblent pas convenir aux esclavagistes d'aujourd'hui...

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