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Argentine : à la veille des élections, un pays plongé dans la crise
Le 27 octobre prochain auront lieu les élections générales argentines. Sauf énorme surprise, le président sortant, Mauricio Macri, homme de droite, héritier d’un empire financier, devra céder la place à son adversaire, le péroniste Alberto Fernandez, qui l’a devancé de 17 points lors des primaires d’août dernier.
Cette sévère défaite a coïncidé avec la plus grande fuite de capitaux depuis 2003, pour un total de 81 milliards de dollars sous la présidence Macri, ce qui explique aussi la fuite... de ses électeurs.
Dès son arrivée en 2015, Macri a remboursé les financiers créanciers de l’Argentine, qui avaient précipité le pays dans le krach de 2001. Pour cela, il a augmenté les tarifs publics de 1 000 % et supprimé une partie des aides et subventions destinées aux plus démunis. Il entendait renouer avec les crédits internationaux suspendus après 2001. Ce faisant, il a ramené la menace d’un nouveau krach.
Ayant rouvert en grand la porte aux financiers et à la spéculation, Macri a relancé l’inflation, qui mine la valeur de la monnaie locale, le peso. Quand il s’est trouvé à cours de trésorerie, il a fait appel au FMI, ce qui a entraîné des plans d’austérité qui ont encore aggravé les conditions d’existence des classes populaires.
Banquiers, capitalistes, et grands propriétaires terriens y ont trouvé leur compte. Parmi les bénéficiaires argentins de la spéculation, on trouve d’ex-ministres, d’ex-PDG de grandes entreprises, des groupes capitalistes comme Techint ou… la famille Macri, qui détient cinquante comptes dans des paradis fiscaux. Parmi les banquiers qui pillent le pays depuis des années, il y a la dizaine de banques argentines qui contrôlent la moitié des dépôts, et des fleurons de la finance internationale : Citibank, Bank Boston, Banco Galicia ou BBVA.
Résultat : la population a replongé dans la crise et la misère à un niveau comparable à celui des crises de 1989 et 2001. Les fermetures d’entreprises ont recommencé dans le secteur privé comme dans les multinationales. Et il est redevenu très difficile de survivre. Dans ce pays d’élevage, le lait manque pour les enfants, les salaires représentent moins de la moitié de ce qu’il faudrait pour vivre, tandis que les pensions de retraite sont quatre ou cinq fois inférieures aux besoins. Inexorablement, l’inflation fait bondir les prix des produits de première nécessité, aliments et médicaments.
Le futur président Fernandez, qui n’envisage pas de rompre avec le FMI, parle de mettre en place un « pacte social ». Un dirigeant de l’aile la plus corrompue de la CGT, celle que les travailleurs combatifs dénoncent comme la « Centrale générale de trahison », pourrait se retrouver ministre du Travail. Objectif de ce pacte : geler pendant six mois les prix, les salaires et le dollar. En pratique, cela reviendrait surtout à geler les salaires, et donc le pouvoir d’achat des travailleurs déjà très amputé. Au-delà, il s’agirait aussi de geler la contestation sociale qui, depuis 2017, n’a cessé de monter contre Macri et ses attaques, obligeant les centrales syndicales, complices de Macri à ses débuts, à lancer des journées d’action, qui ont pris plusieurs fois un caractère massif. Il y a aussi la contestation des femmes, toujours très mobilisées pour faire entrer le droit à l’IVG dans la loi.
L’arrivée d’un nouveau président ne sortira pas les travailleurs du bourbier où Macri et la classe capitaliste les ont plongés. Comme l’ont compris ceux des travailleurs argentins qui, depuis 2003, se sont à maintes reprises mobilisés contre les licenciements, les bas salaires et les multiples attaques du patronat et des gouvernants, le bulletin de vote pourra tout au plus servir à mettre Macri à la porte mais, pour le reste, ils devront se mobiliser dans les usines et dans la rue.