Grippe A02/12/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/12/une2157.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Grippe A

Des files de dizaines de personnes alignées sur les trottoirs... Des mères portant leurs enfants dans les bras pendant des heures... Pas ou peu de chaises, des toilettes en nombre insuffisant... C'est la pagaille dans les centres de vaccination où une partie de la population, désormais convaincue des dangers de la grippe A, commence à affluer.

Certes ce n'est pas une mince affaire de vacciner toute une population ni même, dans un premier temps, les six millions de personnes « à risque ». Mais les conditions dans lesquelles la vaccination se déroule aujourd'hui augurent mal de son efficacité.

Face à la désorganisation flagrante, Sarkozy et sa ministre de la Santé multiplient les proclamations. Les préfets sont pressés d'ouvrir la totalité des centres, dont seuls les deux tiers fonctionnaient jusqu'alors. L'appel est lancé pour que ces centres ouvrent sept jours sur sept et que leurs créneaux horaires soient élargis. Oui mais il ne suffit pas de décréter pour que des médecins surgissent. Alors le ministre de la Défense promet que l'on va mobiliser une centaine de médecins des armées, et on appelle les médecins du travail à la rescousse. En revanche, à ceux des médecins généralistes qui revendiquent de pouvoir vacciner leurs patients, Roselyne Bachelot le leur interdit.

D'abord, dit-elle, c'est à cause du conditionnement du vaccin en multidoses. Voilà qui est un peu gros de la part de celle-là même qui, lors de la signature du contrat, n'a pas su ou pas voulu imposer aux géants de l'industrie pharmaceutique un conditionnement en doses individuelles mais leur a signé sans rechigner une commande pour près d'un milliard d'euros. Ensuite, affirme-t-elle, parce que les généralistes doivent se tenir prêts à soigner ceux qui seront malades. L'argument cache mal un prétexte en forme de gros sous qui serait que chaque vaccination coûterait une consultation à la Sécurité sociale ; sauf que les malades inquiets consultent de toute manière leur médecin pour leur demander un avis, et qu'ils pourraient alors du même coup se faire vacciner. Au lieu de cela, un certain nombre de ceux qu'il serait indispensable de vacciner y renoncent.

Depuis le début de la menace - réelle - de pandémie grippale, la préoccupation du gouvernement est qu'on ne puisse pas lui reprocher de ne pas avoir tout fait, et qu'il ne se retrouve pas dans la situation de l'été 2003 lors de la canicule.

Mais en matière de santé, il est difficile de faire confiance à ce gouvernement qui parachève le démantèlement des services publics, supprime des emplois de personnels soignants dans les hôpitaux, ferme des services hospitaliers, détruit le système de santé afin de pouvoir distribuer largement ses subsides aux plus riches. Et ce n'est pas la façon dont il gère la campagne de vaccination contre la grippe A qui risque de rétablir « le lien de confiance fort entre les autorités gouvernementales et la population », qu'il dit rechercher.

Avec l'accélération de la circulation du virus, l'augmentation du nombre de cas graves nécessitant une hospitalisation dans les services de réanimation, l'augmentation du nombre de décès dus à cette grippe et les annonces de mutation du virus, la défiance envers la vaccination - qui est en partie une défiance envers le gouvernement et sa ministre de la Santé - s'amenuise peut-être.

Mais il reste que cette campagne mal orchestrée par un gouvernement qui ne bénéficie justement pas d'un « lien de confiance fort » fait le jeu des ligues « anti-vaccins » qui, faisant mine d'oublier que si des maladies comme la variole ont été éradiquées c'est justement grâce à la vaccination, profitent du climat de défiance pour déverser sur Internet leurs inepties réactionnaires.

Partager