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Grande-Bretagne : union nationale contre la Syrie
À l’heure où nous écrivons, le Parlement britannique a entamé un débat qui se terminera sans doute par l’extension à la Syrie des bombardements que l’aviation anglaise mène déjà en Irak. Cela faisait longtemps que Cameron cherchait à l’obtenir.
Mais depuis sa tentative manquée, en août 2013, à laquelle 30 députés de son parti s’étaient opposés, il attendait son heure. D’autant qu’il ne s’agissait pas seulement d’arithmétique parlementaire. Il voulait s’assurer que l’opposition travailliste partage la responsabilité de cette nouvelle aventure militaire et de ses conséquences éventuelles.
Aussi Cameron s’est-il emparé avec un cynisme obscène des attentats de Paris et de l’émotion qu’ils ont suscitée en Grande-Bretagne pour relancer son offensive. Une campagne médiatique frisant l’hystérie a mis en relief les « sept attentats comparables » qui, selon le gouvernement, auraient été déjoués cette année et présenté l’appel de Cameron à « détruire Daech » comme un impératif pour la « sécurité nationale ».
Cet appel à l’« union nationale » a immédiatement rencontré un écho parmi les politiciens travaillistes. Jeremy Corbyn, le nouveau leader du parti, connu pour son opposition passée aux guerres menées par son propre parti lorsqu’il était au pouvoir, avait dit qu’il s’opposerait aux plans de Cameron. Du coup, ses adversaires, y compris la majorité de son cabinet fantôme, ont repris à leur compte l’appel de Cameron.
Face à cette rébellion, Corbyn aurait pu s’appuyer sur le soutien d’un certain nombre de syndicats – dont trois des plus importants syndicats du pays. Il aurait pu faire appel aux membres du parti qui l’ont élu, dont la majorité sont favorables au retrait complet des forces britanniques du Moyen-Orient. Enfin, il aurait pu user de son droit d’exiger des députés travaillistes qu’ils votent contre le gouvernement, en application des décisions prises par le dernier congrès du parti. Cela n’aurait sans doute rien changé au nombre des députés défiant ses instructions. Mais cela aurait au moins sanctionné les « rebelles » du cabinet fantôme qui s’en seraient trouvés automatiquement exclus.
Mais Corbyn n’en a rien fait. Fidèle à la ligne qui a été la sienne depuis son élection, il a choisi de se faire le champion de l’« unité du parti », c’est-à-dire, en fait, de celle de sa fraction parlementaire. Les députés travaillistes pourront dont voter « librement, en leur âme et conscience ». Du coup, on estime qu’une centaine de députés travaillistes (sur 231) pourraient se rallier à l’« union nationale » de Cameron.
Une fois de plus, malgré le ton radical de ses discours, Corbyn se révèle n’être guère plus que l’otage d’un parti profondément lié aux intérêts du capital britannique. Et plus que jamais, cela souligne combien, face à l’« union nationale » dont se prévaut Cameron, il serait vital pour la classe ouvrière britannique d’avoir un parti qui représente réellement ses intérêts politiques.