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Dans le monde
Gaz et électricité : la folie des marchés spéculatifs
Depuis quelques mois, les prix de gros du gaz et de l’électricité flambent sur le marché mondial. Cette envolée, que vont subir durement les ménages, résulte bien plus de la spéculation et du fonctionnement de la société que des limites des capacités de production.
Du côté du gaz, le cours à la Bourse de Rotterdam a augmenté de 300 % depuis janvier. Alors que le mégawattheure (MWh) n’a presque jamais dépassé les 30 euros depuis dix ans, il se rapproche désormais de 70 euros. Aux États-Unis, le prix a doublé depuis le début de l’année. Du côté de l’électricité, c’est encore pire, avec 110 euros du MWh, un prix encore jamais atteint.
Comme toujours, les experts avancent des explications pour justifier ces prix délirants. Pour les uns, ce serait la reprise économique et la forte demande venue des industriels. Pour d’autres, c’est l’augmentation du prix de la tonne de carbone, c’est-à-dire le prix à payer pour avoir le droit d’émettre du CO2, à la suite des nouvelles règles fixées par l’UE sous prétexte de limiter le réchauffement climatique. Ce prix a doublé en six mois. Une autre raison avancée pour la flambée du prix de gros de l’électricité est... la hausse du prix du gaz. En effet, le nucléaire ayant été abandonné par l’Allemagne, et les énergies renouvelables comme l’éolien étant soumises aux aléas de la météo, beaucoup de centrales électriques en Europe fonctionnent au gaz. Et comme le gaz flambe...
Si ces explications sont vraies, elles résultent toutes des tares d’une organisation économique où tous les acteurs, industriels ou producteurs d’énergie, sont libres de produire ce qu’ils veulent, sans aucune planification et en cherchant le profit maximum. Même quand les États ou d’autres organismes comme la Commission européenne interviennent, c’est pour définir un prix de la pollution, que les industriels ajoutent au prix de l’énergie. Pire encore, dans les pays comme la France, où l’électricité est très massivement produite par une seule entreprise, EDF, à travers des centrales nucléaires dont les coûts de production ne dépendent ni du vent ni du gaz, l’État a délibérément organisé la concurrence avec des fournisseurs qui ne produisent rien. Ceux-ci achètent l’essentiel de leur électricité à EDF, et le peu qui leur manque sur le marché international. Pourtant, à la fin, le prix de l’électricité payé par les consommateurs, prix qui est encadré par la Commission de régulation de l’électricité (CRE), ne dépend pas du prix de revient du courant réellement produit et livré, mais du cours du MWh sur le marché libre de l’électricité. Sur ce marché très spéculatif, le moindre aléa, changement de législation, tempête, guerre, crise, pandémie, est utilisé pour faire monter les prix.
La flambée actuelle inquiète les industriels, très gros consommateurs d’électricité. Mais eux répercuteront ces coûts supplémentaires sur leurs produits. À la fin, les consommateurs paieront. Les travailleurs et les ménages populaires, eux, n’ont personne sur qui répercuter ces hausses. Pour qu’ils puissent continuer à se chauffer et à payer leur facture d’électricité, ils devront imposer l’indexation de tous les salaires et les pensions sur les prix, y compris ceux de l’énergie.