Maroc : la population pauvre paie le confinement au prix fort01/04/20202020Journal/medias/journalnumero/images/2020/04/2696.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Maroc : la population pauvre paie le confinement au prix fort

Depuis jeudi 19 mars, jour où l’état d’urgence sanitaire a été décrété et où le confinement général a été imposé au Maroc, la vie des plus pauvres est devenue encore plus difficile qu’auparavant.

La diminution drastique de l’activité dans le secteur touristique, mais aussi dans la production textile ou automobile, a entraîné la mise à l’arrêt de nombreuses entreprises. En conséquence, beaucoup de travailleurs ont été purement et simplement licenciés, ou bien leur travail a été « suspendu », de même que le salaire qui va avec.

Près de 121 000 travailleuses agricoles saisonnières n’ont pas pu rejoindre la région de Huelva, en Andalousie, où elles auraient dû cueillir les fraises jusqu’à l’été. La fermeture de la frontière avec l’Espagne à Ceuta est aussi synonyme de chômage pour les milliers de femmes qui transportent les marchandises sur leur dos entre les deux pays. C’est un drame pour beaucoup de ces femmes, qui sont souvent seules à assurer la subsistance de leur famille.

Les migrants subsahariens, qui vivent de petits boulots et de mendicité en attendant de trouver l’opportunité de passer en Europe, sont dans une situation tout aussi dramatique. Du côté des petits paysans, la vente des produits rendue plus difficile avec la fermeture de certains souks s’ajoute à une année de sécheresse qui promet déjà de mauvaises récoltes céréalières pour l’année 2020.

Le confinement entraîne une situation tout aussi difficile pour les vendeurs ambulants, les cireurs de chaussures et tous les travailleurs du secteur « informel » (estimé à 40 % de l’économie), qui doivent trouver chaque jour de quoi nourrir leur famille et tenir jusqu’au lendemain. Ils sont bien obligés de sortir pour cela : ils s’entassent dans les transports en commun réduits depuis le confinement et sont en butte aux forces de police.

En contrôlant les passants et en pourchassant ceux qui n’ont pas l’autorisation de sortir, elles s’attaquent à eux avec les mêmes méthodes brutales et méprisantes que d’habitude : coups de pieds et gifles… mais celles-ci sont assénées avec des gants, Covid-19 oblige. Plus de 500 personnes sont poursuivies par la justice pour avoir violé l’état d’urgence sanitaire et véhiculé de fausses informations, et risquent la prison pour cela.

Comme dans tous les autres pays, la banque centrale marocaine a immédiatement fait caisse ouverte pour que les entreprises puissent se refinancer auprès d’elle. Mais pour les travailleurs sans revenus du fait de la crise sanitaire, les mesures prises sont dérisoires. Il est théoriquement prévu une aide financière, à venir « progressivement à partir du 6 avril », pour les familles bénéficiant de l’équivalent de la CMU, mais cela, c’est pour la galerie. En temps normal, bien des familles pauvres n’ont pas droit à cette CMU et celles qui y ont théoriquement droit se voient refoulées des hôpitaux comme les autres parce qu’elles ne peuvent pas payer.

Pour gérer la crise sanitaire, le roi du Maroc a mis sur pied une cellule de crise comportant les principaux généraux, le directeur général de la Sûreté nationale et le directeur général de la Surveillance du territoire. Pour faire respecter le confinement, les blindés ont été déployés dans les rues des grandes villes. Les autorités marocaines n’ont rien à proposer ou presque pour répondre aux difficultés des travailleurs et des plus pauvres, mais elles sont prêtes à les réprimer.

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