Toray – Ain : “Nous sommes des travailleurs, pas des délinquants !”24/10/20182018Journal/medias/journalnumero/images/2018/10/2621.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Toray – Ain : “Nous sommes des travailleurs, pas des délinquants !”

Après trois semaines de grève contre la répression et le chantage permanent, les ouvriers de cette usine de la banlieue lyonnaise ont voté la reprise, fiers d’avoir relevé la tête et d’avoir fait reculer la direction sur plusieurs points.

Depuis des mois, la direction de cette usine japonaise, qui produit du film alimentaire, avait mis en place des mesures pour briser la solidarité collective et instaurer une ambiance de caserne : promotions d’ouvriers à des postes de line leaders s’ils se démarquaient du syndicat CGT ; multiplication des caméras de vidéosurveillance ; règlement intérieur autorisant des tests salivaires ; interdiction d’utiliser le téléphone portable ; réprimandes au moindre manquement.

Le licenciement pour absences injustifiées d’un travailleur apprécié, au moment où il doit faire face à des problèmes personnels, a été la provocation de trop. Dépassant les habituels débrayages de quelques heures qui perturbent la production, l’atelier Terphane est parti en grève complète, en entraînant d’autres. 130 ouvriers ont fait grève, partielle ou totale, y compris des line leaders refusant d’être des gardes-chiourmes, sur les 200 travailleurs de l’usine qui emploie 500 personnes, intérimaires et sous-traitants compris.

Vendredi 12 octobre, la direction annonçait un moratoire sur le règlement intérieur et multipliait par quatre l’indemnité de licenciement. C’était un premier recul. Mais, considérant la direction comme responsable de la situation, déterminés à lui faire payer les humiliations subies, les grévistes exigeaient le paiement des jours de grève et votaient la poursuite de la grève.

Ils se sont installés sur une pelouse municipale face à l’entrée de l’usine, transformée en quartier général avec barnum, barbecue, sono, camping. C’est là qu’ils discutaient longuement de tous les aspects de leur grève et ont pris toutes leurs décisions collectivement. Ils ont choisi de ne pas bloquer les camions et le portail pour ne pas se couper des non-grévistes que la direction a essayé, en vain, de retourner contre eux. Des habitants, des travailleurs du voisinage qui vivent les mêmes pressions et de nombreux non-grévistes ont marqué leur soutien en versant à la caisse de grève ou en apportant des croissants.

Le 19 octobre, une délégation de 23 grévistes a organisé un aller-retour éclair à Pau, à 800 kilomètres, pour rencontrer les travailleurs d’une autre usine du groupe Toray, confrontés à la même politique patronale, en grève ce jour-là. La chaleur des discussions et la couverture médiatique ont regonflé les participants. Le 23 octobre, faisant le bilan de leurs forces, les grévistes ont décidé d’accepter la dernière proposition de la direction qui portait à 60 000 euros net l’indemnité de licenciement. Ils tenaient à reprendre le travail sans entamer l’unité et la solidarité créées au cours de cette grève qui a d’ores et déjà changé le climat.

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