Editorial

L’hôpital n’est pas tant malade du Covid que du capitalisme

L’hôpital n’est pas tant malade du Covid que du capitalisme

Depuis des mois, les débats sanitaires tournent autour du Covid et de la vaccination. Depuis des mois, le gouvernement fait la morale à la population avec les gestes barrières et le passe sanitaire. Et pendant ce temps, il laisse l’hôpital sombrer.

Les fermetures temporaires des services d’urgence se multiplient dans de nombreuses villes, y compris de services d’urgences pédiatriques, en pleine épidémie de bronchiolite. Nombre de services fonctionnent à la moitié ou aux trois quarts de leurs capacités. Impossible, dans ces conditions, de rattraper le retard lié aux déprogrammations de soins et d’opérations.

Cet état de crise permanente n’est pas dû au Covid, mais aux arrêts maladie, aux démissions et aux nombreux postes non pourvus dans les hôpitaux. Le ministre de la Santé minimise la crise en contestant le chiffre de 20 % de lits fermés avancé par plusieurs responsables, tout en reconnaissant que l’hôpital dispose, à l’heure actuelle, de moins de lits qu’en mars 2020.

Autrement dit, les hôpitaux sont moins bien armés pour la cinquième vague que pour la première. Les responsables de la catastrophe sont donc au pouvoir et ils ne sont pas à chercher du côté des non-vaccinés.

Beaucoup, parmi les soignants et la population, avaient nourri l’espoir que la crise sanitaire serve d’électrochoc pour l’hôpital. Les 120 000 morts, les déprogrammations, le manque de matériel et de personnel avaient fait la preuve de la dangerosité de la gestion comptable de l’hôpital. Le personnel, applaudi pour son abnégation et son courage, espérait enfin être écouté. Eh bien non ! L’après-Covid a été la douche froide.

Le gouvernement prétend avoir beaucoup fait avec le Ségur de la santé, mais les primes versées n’ont été que du saupoudrage et elles n’ont pas stoppé l’hémorragie de personnel confronté à des salaires trop bas et des conditions de travail toujours plus dures. L’afflux de malades du Covid replonge aujourd’hui le personnel dans la gestion de crise, avec tout ce que cela engendre de surmenage, d’épuisement et de stress.

Pour justifier le manque de soignants, Véran se cache derrière le fait qu’il faut des années pour les former. Mais qu’il commence par les payer correctement, pour qu’ils ne partent pas dans les cliniques privées ou vers la médecine libérale !

Que Véran explique aussi pourquoi le nombre de places en écoles d’infirmiers n’a quasiment pas augmenté depuis deux ans et pourquoi le financement des formations internes à l’hôpital se fait encore au compte-gouttes ! Qui peut croire qu’en deux ans il soit impossible de former les techniciens de laboratoire, les brancardiers ou les agents d’accueil qui manquent aussi ? Des dizaines de milliers de jeunes galèrent entre petits boulots et chômage, ils seraient prêts à s’engager dans ce type de métier si on leur donnait les moyens financiers de se former.

Il y a pénurie de bras et de matériel parce que le gouvernement, comme ses prédécesseurs, gère l’hôpital comme une entreprise. Là où il faudrait soigner, il est demandé de faire du chiffre et de travailler à la chaîne. Pour le personnel, cela signifie surcharge de travail, rappel sur les jours de repos ou de congés, roulements chamboulés, horaires décalés, changements de service et mépris de la part de la hiérarchie…

La façon dont les salariés des hôpitaux sont traités ressemble au sort des travailleurs dans nombre d’entreprises, car aucun secteur n’échappe à la loi du profit. Dans les hôpitaux publics, celle-ci ne se présente pas sous la forme d’actionnaires exigeant leur dividende, mais elle s’impose au travers des restrictions budgétaires, des indicateurs financiers et des critères de rentabilité artificiels. Cela, parce que les capitalistes profitent volontiers de toutes les affaires qu’ils peuvent faire avec les hôpitaux, tout en exigeant du gouvernement qu’il réduise les dépenses publiques.

C’est cette course au profit qui fait mourir les hôpitaux à petit feu. C’est aussi elle qui empêche la levée des brevets sur les vaccins anti-Covid et freine la lutte contre la pandémie. C’est elle qui provoque le chômage de masse, la précarité et pèse sur les salaires. C’est elle qui s’oppose au respect des hommes et de l’environnement.

Mais la loi du profit n’est pas une loi de la nature, c’est une loi de la bourgeoisie, qui est la seule à avoir intérêt à ce que rien ne change. Quand, à travers des luttes, les travailleurs prendront conscience qu’ils ont la force d’imposer leur propre loi et d’organiser la société pour qu’elle réponde à leurs besoins et aux intérêts de la majorité, la course au profit n’aura plus lieu d’être !

Bulletins d’entreprise du 13 décembre 2021

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