- Accueil
- Lutte ouvrière n°2800
- Biden en Europe : les coups de menton du chef de l’impérialisme
Dans le monde
Biden en Europe : les coups de menton du chef de l’impérialisme
Joe Biden a traversé l’Atlantique pour participer au sommet de l’OTAN le 24 mars, avant de visiter des bases américaines en Pologne. Au même moment, Anthony Blinken, son secrétaire d’État, rencontrait en Israël les dirigeants de l’Arabie saoudite et d’autres pays du Moyen-Orient. Les deux avaient le même objectif : consolider des alliances dont les États-Unis sont les maîtres d’œuvre.
Les États-Unis fournissent et financent la plus grande part des armes livrées à l’Ukraine. Des conseillers américains ont formé l’armée et les milices ukrainiennes. Le nombre de soldats américains présents sur des bases militaires européennes vient aussi d’être porté à 100 000, dont 40 000 sont stationnés dans des pays limitrophes de l’Ukraine. Par ailleurs les États-Unis ont décidé les sanctions les plus sévères contre la Russie. Ils peuvent le faire d’autant plus aisément que, contrairement à l’Allemagne ou l’Italie, ils sont indépendants de ce pays pour leurs fournitures de gaz ou de pétrole. Au contraire, l’embargo sur le gaz russe est une aubaine pour les pétroliers américains. Pour d’autres capitalistes, comme les constructeurs automobiles américains, le marché russe n’a pas la même importance que pour leurs homologues allemands ou français. Bien qu’alliés, les États-Unis, la France et l’Allemagne restent des impérialismes concurrents dont les intérêts divergent.
Avec ce déplacement, Biden est donc venu exercer une pression sur ses alliés. Il veut les pousser à augmenter fortement leurs budgets militaires et leur part dans le financement de l’Otan. En effet, si la situation et les rapports de force obligent Macron et Scholz à suivre face à Poutine celui qui est le chef de bande, ils ne manquent pas une occasion d’afficher leur retenue, répétant qu’il faut « éviter l’escalade des mots et des actions ».
On l’a vu lorsque Biden s’est laissé entraîner par l’ambiance qui règne en Pologne, où la crainte d’une invasion russe est forte. Après avoir traité Poutine de « boucher », il a déclaré : « Cet homme ne peut pas rester au pouvoir. » Même son entourage a dû fermement le démentir. En effet, malgré toute la campagne politique et médiatique qui dénonce Poutine comme un dictateur sanguinaire, voire comme un fou, les dirigeants occidentaux savent que jusqu’à nouvel ordre c’est avec lui qu’ils devront parler. Quant à souhaiter sa chute, ils ont trop besoin d’un régime à poigne capable de maintenir l’ordre sur le vaste territoire de la Russie. Il leur faut non pas l’abattre, mais l’affaiblir suffisamment pour l’obliger à accepter un compromis qui leur soit le plus favorable possible.
Au même moment, le déplacement de Blinken au Moyen-Orient avait le même but : tenter de resserrer les liens avec les alliés régionaux. Massivement armés par les États-Unis, les dirigeants israéliens, saoudiens et émiratis rechignent pourtant à critiquer et surtout à sanctionner la Russie de Poutine. Comme la Turquie, la Chine ou l’Inde, ces pays ne souhaitent pas rompre avec la Russie, tant pour des liens commerciaux que pour des raisons politiques, pour garder une certaine liberté de manœuvre face à l’hégémonie américaine.
Pour les États-Unis, la guerre en Ukraine est aussi une occasion de resserrer leurs alliances. Pour l’instant, le but est de circonscrire l’influence de la Russie, mais demain ces mêmes alliances peuvent servir dans le cadre d’un affrontement plus global, voire d’un conflit mondial qui fait toujours partie des scénarios de guerre envisagés par les états-majors.