Urgences : ce qui est rare devient cher29/12/20212021Journal/medias/journalnumero/images/2021/12/2787.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Urgences : ce qui est rare devient cher

À partir du 1er janvier, une nouvelle tarification sera appliquée pour une consultation aux Urgences d’un hôpital sans hospitalisation à la suite, et ce dès la sortie du service.

Le forfait patient urgences, le FPU, sera remboursé à 80 % par l’Assurance maladie, le reste étant à la charge du malade ou de sa complémentaire santé, s’il en a une. On ne peut pas dire que le passage aux Urgences devient payant, il l’était déjà. Mais, à la différence de l’ancien système, celui qu’a instauré la loi sur le financement de la Sécurité sociale 2022 impose le paiement immédiat de la somme de 19,61 euros, au lieu d’une facture reçue deux mois plus tard. Il risque de dissuader des malades sans ressources, sans mutuelle ou sans papiers. Seuls les femmes enceintes de plus de cinq mois ou les patients atteints de certaines affections longue durée bénéficieront d’un tarif réduit de 8,49 euros.

S’accompagnant pudiquement d’une phrase sur la simplification de la démarche pour l’usager, l’objectif affiché par le gouvernement est de permettre aux hôpitaux de recouvrer 100 % des factures, alors qu’ils n’en percevraient que 30 % actuellement. Il n’empêche que, comme le résume un travailleur hospitalier au Huffington Post : « Très concrètement, le 31 décembre, si tu arrives aux Urgences, tu es pris en charge et tu repars sans payer. Dès le 1er janvier, après t’avoir pris en charge, on te demande 19 euros. »

Au-delà de ce qui peut vite devenir un problème vital pour certains malades, cette mesure révèle le mépris des autorités gouvernementales pour la crise des services d’urgence. Devant une commission d’enquête du Sénat, des urgentistes la dénonçaient encore mi-décembre en constatant : « La catastrophe est permanente, le flux ne s’arrête jamais .» Une cheffe du service des Urgences du Centre hospitalier de Laval y a déploré un effectif qui devrait être multiplié par trois ou quatre, et ce « dans un établissement sous-dimensionné pour la demande locale ». Elle raconte une situation indigne récente, où une dame de 95 ans est restée 36 heures dans le couloir des Urgences avant d’être prise en charge.

Faute d’accès à un médecin traitant et surtout en cette période d’épidémie, « les urgences sont la seule lumière allumée », comme le dit un témoin à la commission sénatoriale. Et ces services, loin de pouvoir satisfaire toute la demande, sont bloqués en aval par le manque de lits d’hospitalisation, et en amont par la politique criminelle qui en oblige beaucoup trop à fermer purement et simplement la nuit ou le week-end, faute de personnel, comme à Laval, Senlis, Clamecy, Draguignan et ailleurs.

Les Urgences craquent, l’hôpital n’en est pas loin.

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