Bolloré en Afrique : une affaire aussi choquante que courante03/03/20212021Journal/medias/journalnumero/images/2021/03/2744.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Bolloré en Afrique : une affaire aussi choquante que courante

Le tribunal de Paris vient de refuser de valider un accord à l’amiable entre le parquet national financier et le milliardaire Bolloré, dans une affaire de corruption en Afrique, et a demandé un procès.

Cet accord était très avantageux pour Bolloré car il prévoyait qu’il ne puisse plus être inquiété, en échange d’une reconnaissance de culpabilité et du versement d’une simple amende de 375 000 euros. C’est une goutte d’eau pour ce capitaliste qui contrôle Vivendi, le groupe de communication Havas et un vaste empire logistique en Afrique.

Ainsi, Bolloré a reconnu avoir financé en 2009 et 2010 une partie des dépenses électorales de deux présidents africains, Condé en Guinée et Gnassingbé au Togo, et avoir été en retour avantagé dans l’obtention de marchés dans ces deux pays. En Guinée, Condé lui a confié la gestion du port de Conakry en 2011 après avoir éjecté le groupe français Necotrans, avec qui il avait pourtant signé une convention deux ans plus tôt pour une durée de 25 ans.

Cette affaire ne constitue pas qu’un épisode banal et ordinaire de la guerre que Bolloré livre depuis des années pour écraser ses concurrents en Afrique. En moins de quarante ans, il s’est ainsi constitué un empire colossal et particulièrement rentable puisque si l’Afrique représente 20 % des activités du groupe, elle a pu rapporter certaines années plus de 80 % de ses profits.

Cela a été possible parce que Bolloré dispose d’un solide réseau au sein des États, en France comme en Afrique. Le président guinéen Condé a ainsi déclaré de lui en 2016 : « C’est un ami. Je privilégie les amis. Et alors ? »

Et le vice-président du groupe fut pendant des années Michel Roussin, un ancien ministre de la Coopération en 1993-1994, et par ailleurs ancien haut cadre des services secrets !

Ces pratiques sont monnaie courante de la part des trusts français, qui considèrent ces pays d’Afrique de l’Ouest comme leur chasse gardée, grâce au soutien inconditionnel de l’État et de l’armée française, quel que soit le gouvernement.

Le tribunal de Paris semble cette fois intervenir dans les affaires de Bolloré en tant que personne, mais il a par ailleurs, pour la société du même Bolloré, accepté l’abandon des poursuites en échange d’une amende de 12 millions d’euros : autant dire que ce n’est pas cet épisode judiciaire qui mettra fin au pillage de l’Afrique par l’impérialisme français.

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