L’état d’urgence prolongé : fuite en avant sécuritaire17/02/20162016Journal/medias/journalnumero/images/2016/02/2481.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

L’état d’urgence prolongé : fuite en avant sécuritaire

Après le Sénat et la commission des lois de l’Assemblée nationale, les députés ont voté à une large majorité la prolongation pour trois mois de l’état d’urgence, initialement décidé par Hollande pour une durée de douze jours au lendemain des attentats du 13 novembre.

Hormis quelques députés « frondeurs » et écologistes, ainsi que les élus du Front de Gauche qui avaient pourtant jugé bon de voter « pour » en novembre, tous ont donc soutenu Hollande et Valls. Le « péril imminent » censé justifier cette carte blanche donnée aux préfets et à la police au nom de la lutte contre le terrorisme serait toujours d’actualité, « jusqu’à ce que Daech soit éradiqué », déclarait dernièrement Valls devant un micro de la BBC britannique. D’une efficacité toute relative selon les critères de Cazeneuve, le ministre de l’Intérieur, les 3 340 perquisitions administratives autorisées par les préfets n’ont permis de saisir que 42 armes contre 578 confisquées au cours des procédures habituelles. Additionnées aux assignations à résidence, elles n’ont débouché que sur cinq procédures confiées au pôle antiterroriste.

Défendant son bilan, Cazeneuve a argué que les fichiers de renseignements s’en étaient trouvés alimentés, que des doutes avaient été levés. Faisait-il allusion au couple de maraîchers bio de Dordogne, jeté hors du lit par une brigade de policiers, sans doute à la recherche du Concombre Masqué, ou au fils dévoué – et malheureusement pour lui d’origine arabe –, pris en flagrant délit de téléphoner à sa mère en face des locaux de Charlie et du coup soupçonné d’y avoir fait des repérages ?

La prolongation répétitive de l’état d’urgence laisse les coudées franches à l’arbitraire des préfets et de la police. Même si Cazeneuve a conseillé, lors des perquisitions, de préférer au bris des portes leur « ouverture naturelle », combien de travailleurs d’origine maghrébine ou africaine, avec ou sans papiers, se sentent plus ou moins menacés par ces pleins pouvoirs conférés à la police ?

Plus il dure, plus l’état d’urgence est inefficace vis-à-vis des risques d’attentats venant de Daech, aussi longtemps que se poursuit la politique menée au Moyen Orient et en Afrique par les grandes puissances comme la France, politique qui entretient la guerre et ses fléaux. Mais Hollande et Valls, en dépit ou en raison de leur baisse de popularité dans les sondages, poursuivent leur fuite en avant sécuritaire.

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