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Dans le monde
Égypte : la police assassine
Le 25 janvier dernier, date anniversaire du début des manifestations qui allaient entraîner la démission de Moubarak, un chercheur italien de 28 ans, Giulio Regeni, disparaissait au Caire. Son corps était retrouvé dix jours plus tard dans un fossé de banlieue, portant des traces de tortures.
Préparant une thèse sur le mouvement ouvrier et syndical en Égypte, Giulio Regeni avait été en contact avec des militants opposés au syndicat officiel du pays, étroitement lié au pouvoir. En décembre 2015, il avait assisté à une réunion de militants de syndicats indépendants. Il y aurait, selon des témoins, été photographié.
Le 3 février, jour de la découverte du corps, l’affaire tombait bien mal car des ministres et grands patrons italiens étaient en visite officielle au Caire, pour conclure des accords économiques.
Les services de sécurité égyptiens se sont dits totalement étrangers à l’assassinat et ont fait courir des bruits accusant ce dernier d’espionnage, suggérant même qu’il aurait pu être victime de règlements de comptes de milieux homosexuels, ou d’un crime crapuleux. Mais pour ses amis, comme pour les opposants au régime, il a été victime des méthodes barbares d’une des nombreuses branches de la Sécurité. « Malheureusement, disait l’une d’entre eux, il est mort de la même façon que beaucoup d’Égyptiens meurent chaque jour. »
En effet, des centaines d’opposants ou supposés tels croupissent dans les geôles du régime de l’ex-maréchal al-Sissi, et nombre d’entre eux ont, selon des ONG, disparu dans les mêmes conditions que Giulio Regeni. La police a les coudées franches pour arrêter, battre, tuer, au point que al-Sissi s’est senti obligé, il y a peu, de conseiller à ses sbires de se modérer. Un an plus tôt, la militante Shaima al-Sabbagh avait été abattue par un policier lors d’un rassemblement en mémoire des opposants victimes de la répression. Amère coïncidence, le policier assassin, alors condamné à 15 ans de prison, vient de voir sa peine annulée par la Cour de cassation…
Cinq ans après le départ de Moubarak, l’armée est revenue au pouvoir et un de ses principaux officiers est à la tête du pays, exerçant une dictature d’autant plus implacable que la situation de la population pauvre continue de s’aggraver et que, ces derniers mois, des dizaines de mouvements de grève ont touché les entreprises étatisées comme privatisées, petites et grandes. Les travailleurs y exigent toujours le versement des primes annoncées mais jamais payées, et tentent toujours d’imposer, contre la dictature, la reconnaissance de leurs propres représentants.