CETA : pile ils gagnent, face on perd27/03/20242024Journal/medias/journalnumero/images/2024/03/une_2904.jpg.445x577_q85_box-0%2C132%2C1383%2C1926_crop_detail.jpg

Leur société

CETA : pile ils gagnent, face on perd

Jeudi 21 mars, les sénateurs ont refusé de ratifier le traité de libre-échange général entre le Canada et l’Union européenne, CETA selon l’acronyme anglais.

On a trouvé d’un côté les défenseurs du traité, c’est-à-dire les soutiens du gouvernement, prêts à affirmer qu’il favorise les bonnes affaires, le progrès économique. De l’autre, ses détracteurs ont dénoncé la ruine de la petite agriculture et la remise en cause des droits sociaux, en affirmant que l’ultime rempart pour les travailleurs serait constitué par les frontières nationales, dont le PCF qui a qualifié le rejet de « coup de tonnerre ». Il est bien plus probable qu’il s’agisse d’un pétard mouillé.

Cette pièce se joue à la signature de chaque traité, et il s’en signe en permanence pour favoriser des affaires qui ne peuvent être qu’internationales. L’absurdité de la discussion et du vote actuels vient de ce que le CETA s’applique déjà, dans ses grandes lignes, depuis 2017. On n’a pourtant pas connu depuis lors d’explosion des échanges UE-Canada et surtout pas l’avalanche de viande de bœuf qui serait, paraît-il, à craindre. En 2023 le Canada en a exporté 1 400 tonnes vers une Europe qui en consomme 5 millions de tonnes par an ! En revanche ses exportations de lithium, d’uranium et de pétrole de schiste ont plus que doublé, des matières premières qui n’intéressent ni ne concurrencent le petit paysan ou la coopérative fromagère mais sont en revanche essentielles à la grande industrie. L’interruption partielle des échanges avec la Russie rend d’ailleurs ces importations d’autant plus nécessaires pour les capitalistes européens.

Les groupes industriels intéressés à l’accord et les États qui les représentent n’ont donc pas attendu que les Parlements des différents pays ratifient le traité. Ils l’ont appliqué immédiatement et ont retardé autant qu’ils le pouvaient les différents votes car, dans tous les pays, des partis d’opposition font profession de dénoncer les traités de libre-échange. Pour ceux qui, comme LR ou le PS, passent régulièrement aux affaires, c’est grotesque : le CETA a été négocié sous Hollande et nombre d’autres du même genre l’ont été sous Sarkozy, pour ne pas remonter plus loin.

L’extrême droite, le PCF, LFI et les écologistes qui ont voté contre le traité disent ainsi vouloir défendre le petit agriculteur et la nourriture saine produite près de chez nous. Mais on peut parier que ces partis, s’ils parviennent au pouvoir, s’aligneront sur les besoins du grand patronat et sacrifieront, comme le fait Macron, autant de petits agriculteurs qu’il faudra pour sauvegarder les intérêts du grand capital.

Alors, faut-il être pour la signature du CETA ou s’y opposer ? Faut-il faire confiance au libre-échange ou considérer les frontières comme une protection ? Ce débat est un leurre. Les travailleurs des différents pays ne sauveront leurs conditions de vie que s’ils contraignent les capitalistes à en payer le prix en prenant sur les profits tirés de l’exploitation, que ce soit dans le contexte du libre-échange ou à l’abri des frontières. On peut en dire autant des petits paysans écrasés par la pression du grand capital. Aucune frontière, aucun traité entre capitalistes et aucun débat parlementaire qui le rejetterait ne sauvera ceux qui doivent vivre de leur travail.

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