Autoroutes : une affaire en or23/09/20202020Journal/medias/journalnumero/images/2020/09/2721.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Autoroutes : une affaire en or

Un rapport du Sénat publié le 18 septembre souligne les énormes profits réalisés par les sociétés d’autoroutes depuis leur privatisation.

Évoquant la possibilité d’une augmentation des tarifs le 1er février 2021 pour cause de Covid-19, les sénateurs expliquent que « la situation financière des concessions historiques ne saurait justifier une compensation, même partielle, des conséquences de la crise sanitaire car la poursuite de leur activité n’est pas menacée. »

C’est le moins qu’on puisse dire. Depuis la privatisation en 2006 de la plus grande partie du réseau autoroutier par le gouvernement de droite dirigé par De Villepin, les sociétés concessionnaires ont distribué autour de 23 milliards d’euros de dividendes. L’achat des concessions ne leur avait coûté, en 2006, que 14,8 milliards d’euros, un tarif sous-évalué d’au moins 6,5 milliards d’après le calcul des sénateurs.

À l’époque, le gros des investissements liés à la construction des autoroutes avait déjà été réalisé par l’État. La possibilité d’encaisser les péages des usagers leur assurait des profits importants, sans aucun risque. Les dépenses liées aux travaux d’entretien ont servi à justifier les augmentations régulières des tarifs des péages. Et dans le même temps, les sociétés d’autoroutes ont économisé sur les salaires, en supprimant 16 000 emplois depuis 2006.

Si les sénateurs socialistes et communistes réclament « un retour à la gestion publique », ils oublient de rappeler que la privatisation des autoroutes avait été enclenchée au début des années 2000 par la gauche alors au pouvoir, avec le socialiste Jospin Premier ministre et le communiste Jean-Claude Gayssot ministre des Transports, qui avait vendu 49 % des Autoroutes du sud de la France (ASF). Plus tard, en 2015, sous la présidence de Hollande, Ségolène Royal, ministre de l’Écologie, avait annoncé à grand bruit un gel des tarifs des péages pour un an. Mais, en contrepartie, dans le cadre de négociations restées longtemps secrètes, elle avait accordé aux sociétés d’autoroutes la prolongation de la durée de leur concession et le droit d’augmenter leurs tarifs jusqu’en 2023.

Vincent Delahaye, rapporteur de la commission et sénateur UDI, loin de vouloir renationaliser les autoroutes, souhaite « se mettre d’accord sur des choses raisonnables » avec les concessionnaires pour éviter de donner « du grain à moudre à ceux qui défendent les thèses d’une renationalisation. » Mais rien ne dit que les actionnaires de Vinci ou Eiffage se montreront raisonnables, d’autant qu’ils n’ont rien à craindre du côté du gouvernement. Un décret publié au mois d’août ouvre même la possibilité de céder aux sociétés autoroutières des portions de routes nationales, dont elles s’engageraient à assurer l’entretien en échange de la prolongation des concessions.

Il n’est pas dit que Vinci et Cie tiennent leurs promesses. Par contre, il est raisonnable de penser qu’ils continueront de racketter les automobilistes sans aucune modération.

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