Essence, diesel, kérosène… : embargo et spéculation08/02/20232023Journal/medias/journalnumero/images/2023/02/2845.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Essence, diesel, kérosène… : embargo et spéculation

Le 5 février, les pays du G7 et l’Australie ont décidé un embargo sur tous les produits pétroliers raffinés venant de Russie. Au brut, visé dès décembre dernier, s’ajoutent le diesel, le fioul, le mazout et le kérosène.

L’objectif annoncé est de punir l’État russe pour la guerre en Ukraine, en tarissant les ressources qu’il tire de ses exportations pétrolières.

En fait, l’Europe, qui était grandement dépendante des importations russes de produits pétroliers, raffinés ou non, s’est donné le temps de trouver des fournisseurs de substitution. Il en est de même des États-Unis, qui importent des volumes non négligeables de pétrole russe, bien qu’ils aient leurs propres gisements à domicile.

Les uns et les autres ont donc conclu des contrats avec des pays qui ont saisi l’opportunité des sanctions occidentales pour se transformer en exportateurs de produits pétroliers. Ainsi, l’Inde, dont le pétrole russe ne représentait que 1 % des importations avant la guerre en Ukraine, en absorbe désormais 28 fois plus : 1,27 million de barils. Parce qu’il est désormais transformé en Inde, le pétrole russe est considéré comme un produit indien, que les pays du G7 peuvent donc acheter au prix du marché.

La Russie perdrait dans l’affaire une centaine de millions de dollars par jour, mais elle peut ainsi quand même exporter sa production, dont l’Occident a toujours besoin, et elle le fait en quantités plus importantes qu’auparavant. Les pays relais, comme l’Inde, y trouvent aussi leur compte en s’approvisionnant à bon prix auprès de la Russie. Ils prélèvent leur dîme au passage, quand ils revendent la fraction du pétrole russe transformé qu’ils n’ont pas consommée. Les compagnies pétrolières américaines et européennes en profitent aussi : elles continuent d’avoir de quoi inonder les stations-service du monde entier et les secteurs économiques qui dépendent du pétrole, de l’agriculture aux transports, au chauffage domestique, etc.

Alors, l’opération est-elle finalement blanche ? Pas pour les usagers en tout cas. On les a déjà avertis qu’ils ne devaient pas s’attendre à des baisses de prix, au contraire. Ce système, qui crée un grand nombre d’intermédiaires supplémentaires, doit les engraisser, eux et les spéculateurs, qui voient là se multiplier les occasions de faire de gros coups à l’échelle planétaire. Et, bien sûr, il y a les majors comme Total qui, comme à leur habitude, peuvent s’octroyer la part du lion dans l’affaire. La guerre en Ukraine est le meilleur carburant à l’envolée de leurs profits…

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