États-Unis : La crise et ses répercussions politiques04/11/20202020Journal/medias/journalnumero/images/2020/11/2727.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

États-Unis : La crise et ses répercussions politiques

Au moins onze millions d’emplois détruits cette année, près de quarante millions de personnes dépendant de l’aide alimentaire, dix millions de contaminations par le coronavirus ayant entraîné à ce jour plus de 230 000 décès : telle est la situation dans laquelle se débat la population américaine au moment des élections.

La pandémie a durement frappé les couches populaires : Noirs, immigrés, travailleurs dans les secteurs industriels, l’agriculture ou les petits boulots. Au niveau fédéral, la démagogie d’un Trump, tout à sa campagne électorale, a abouti à l’immobilisme, et même à saper les efforts des autorités locales pour freiner l’épidémie.

Le choc sanitaire a été le catalyseur de la crise économique qui s’est accélérée au printemps dernier. Un ralentissement économique était déjà en cours depuis plusieurs années, à peine masqué par la spéculation boursière qui faisait monter les cours de la Bourse à Wall Street. Les cadeaux fiscaux de Trump, qui a baissé l’impôt sur les bénéfices des entreprises de 35 à 21 % en 2017, n’ont fait qu’accroître la masse de capitaux attirés par la seule activité financière et accélérer la crise.

Le premier réflexe du patronat aux mois de mars et d’avril a été de licencier massivement : entre 30 et 40 millions de travailleurs ont alors été précipités au chômage, dont le taux officiel a été multiplié par 3,5 en deux mois ! Il a ensuite baissé, mais en octobre on comptait chaque semaine entre 750 000 et un million de nouvelles inscriptions au chômage.

En catastrophe, des mesures d’aide ont été prises pour les chômeurs et les ménages. Mais cela n’a pas empêché les queues pour l’aide alimentaire de se former partout dans le pays. La crainte de perdre son logement s’est répandue, comme lors de la crise précédente, il y a douze ans.

L’aide de l’État fédéral et de la Fed, la banque centrale, a été principalement dirigée vers le grand patronat. Pour l’aider à sauver ses profits, 2 000 milliards ont été débloqués rapidement : pour cela, les démocrates et les républicains ont mis de côté leurs querelles et leur rivalité pour le pouvoir. Même Trump s’est entendu avec une des femmes qu’il hait le plus, la présidente de la Chambre des représentants à majorité démocrate, pour que ce plan soit voté en mars dernier.

Révoltés par la brutalité policière répétée envers les Noirs, des millions d’Américains ont participé à des manifestations antiracistes cette année. La mort de George Floyd, un Noir étouffé par le genou d’un policier blanc en mai dernier, filmée par des passants horrifiés, y a été pour beaucoup. Ce n’était pas la première fois qu’un meurtre raciste faisait l’objet de telles vidéos. Mais dans un contexte social de plus en plus tendu, elle a entraîné des manifestations contre le racisme qui ont duré tout l’été.

Face à cette mobilisation, des bandes d’extrême droite armées ont paradé démonstrativement en soutien aux forces anti-émeutes de la police pour « nettoyer les rues », entraînant des confrontations qui ont déjà fait quelques morts.

Toute la présidence de Trump a été marquée par le nationalisme, par un racisme à peine dissimulé visant à accentuer les divisions, par la démagogie anti-immigrés, le sexisme, la bigoterie religieuse, l’anticommunisme, encourageant les préjugés réactionnaires de larges couches de la population qui constituent son socle électoral. L’extrême droite y a aussi trouvé un vivier pour recruter, et elle ne se contentera peut-être pas de servir de force d’appoint à Trump et aux républicains.

Les tensions politiques ont jusqu’à présent été largement canalisées par la campagne électorale. À l’avenir, elles prendront peut-être d’autres formes, d’autant plus brutales que le capitalisme en crise bouleverse la vie de tant de gens. C’est pourquoi attribuer toute la responsabilité de la situation catastrophique au seul Trump, comme l’ont fait les démocrates pour faire élire Biden, revient à cacher les causes réelles de la crise : l’avidité d’une bourgeoisie qui précipite le monde du travail vers l’abîme.

C’est cette bourgeoisie qu’il faudra renverser si les travailleurs ne veulent pas subir l’exploitation, le chômage et la pauvreté, en y étant contraints par un État brutal et raciste, voire par la menace de milices armées fascisantes.

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