Dans le monde

Crise pétrolière : les emplois consumés

Lundi 2 novembre, après avoir déjà reculé de 10 % la semaine précédente, les cours mondiaux du pétrole enregistraient une nouvelle chute, les ramenant au niveau du mois de mai dernier.

Avec la deuxième vague de Coronavirus et l’aggravation prévisible de la crise économique, les spéculateurs anticipent une nouvelle baisse de la demande mondiale et tirent les prix à la baisse. Mais, dans le secteur pétrolier, la crise se combine avec la guerre commerciale que se livrent trois acteurs principaux, l’Arabie saoudite, la Russie et les producteurs de pétrole de schiste aux États-Unis. Cette guerre se déroule sur fond de surproduction mondiale chronique et est bien antérieure à l’épidémie.

Selon une étude, 20 % – un million – des cinq millions d’emplois que le secteur pétrolier compte à l’échelle de la planète sont condamnés dans les mois qui viennent. 100 000 travailleurs auraient déjà perdu leur emploi. Aux États-Unis, des centaines de petits producteurs de pétrole de schiste, dont la production n’est pas rentable à moins de 50 dollars le baril, sont à bout de souffle.

La plupart des grandes compagnies pétrolières n’en ont pas moins choisi de maintenir les milliards de dividendes promis aux actionnaires. Elles ont pour cela emprunté sur les marchés financiers et elles réduisent leurs coûts. Ainsi, British Petroleum a décidé de verser 7 milliards de dollars de dividendes après avoir annoncé en juin la suppression de 10 000 emplois ; Chevron, la deuxième compagnie pétrolière américaine, prévoit de supprimer 6 000 emplois ; le français Total, 3 000 dans sa filiale Hutchinson, 150 à Grandpuits en France et, d’après le directeur de Total, sans doute 10 % des effectifs des sièges.

Les compagnies pétrolières ont de plus toutes revu à la baisse, en moyenne de 20 %, leurs investissements dans l’exploration de nouveaux champs, entraînant une cascade de suppressions d’emplois dans la sous-traitance. Ainsi, Schlumberger, multinationale américaine qui vend aux compagnies services et équipements, supprime un quart de ses effectifs dans le monde, 21 000 emplois. Le français Vallourec en supprime 900 aux États-Unis. CGG, parapétrolier spécialisé dans l’exploration et dont le siège est à Massy dans l’Essonne, y supprime 100 emplois de plus, ramenant l’effectif à 270 alors qu’il était de 900 en 2015. En Europe, 200 entreprises, essentiellement britanniques et norvégiennes, sous-traitantes des grandes compagnies pétrolières, sont menacées par la crise.

Les crises économiques sont l’occasion pour les plus forts des capitalistes de concentrer un peu plus les secteurs qu’ils dominent. Elles sont aussi l’occasion de réorienter plus vite leur capital, en laissant tomber ce qui est moins rentable. Ainsi les grands groupes pétroliers, sans abandonner le pétrole, investissent aussi dans les énergies renouvelables et, surtout, dans le gaz naturel. Total et BP, qui avaient déjà des programmes en ce sens, ont décidé d’aller plus vite. Il s’agit pour eux de garantir les dividendes des actionnaires. Ni l’emploi des travailleurs, ni l’avenir de la planète n’entrent en ligne de compte.

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